MARVEL EPIC COLLECTION : AMAZING SPIDER-MAN (collectif)

Début 2022, l’éditeur Panini Comics annonce modifier une partie de son approche de publication des comics passés et glorieux, en voulant reprendre le principe de Marvel Epic Collection. Celle-ci est une gamme lancée en 2014 par Marvel Comics, en Amérique, proposant des grandes sagas de plusieurs séries en format souple, soit beaucoup de pages pour un prix attractif.
Suivant une vague actuelle de titres à la grande pagination, mais au coût abordable pour des formats différents du cartonné désormais habituel, Panini Comics se lance en juin 2022 avec son personnage phare : Spider-Man. Marvel Epic version Panini propose ainsi entre 15 et 20 épisodes de périodes importantes, soit dans un format souple (à 26 €), soit dans un format cartonné (à 30 €).

L’un des deux premiers volumes de cette nouvelle collection est Marvel Epic : La mort du capitaine Stacy, qui plonge le lecteur dans les n°86 à 104 d’Amazing Spider-Man, entre juillet 1970 et janvier 1972.
Des épisodes importants pour ce qu’ils apportent, ce qu’ils bouleversent, ce qu’ils révèlent de l’époque. Mais aussi parce que les quatre derniers sont les premiers à ne pas être écrits par Stan Lee, qui abandonne ainsi la locomotive Marvel et prend du recul dans l’activité comics.

Mais que raconte ces 19 numéros ?
Sans tout trahir, le lecteur peut y trouver des éléments réellement marquants, autant pour Spider-Man que pour l’univers Marvel. Le n°86 révolutionne le personnage de Black Widow, qui abandonne son look et sa posture de femme fatale des années 50 pour devenir une super-héroïne fluide et active, avec un changement de costume épatant. Le n°87 montre comment et pourquoi un Peter Parker épuisé et brisé en vient à révéler à ses proches (dont Gwen Stacy) qu’il est Spider-Man… et comment il se sort de là.
Les n°88 à 90 forment un triptyque où Spider-Man affronte brutalement et difficilement le Dr Octopus, avec hélas la disparition héroïque mais tragique du Capitaine Stacy, père de Gwen. Les n°91 à 93 gèrent les conséquences de ce drame, avec notamment Gwen qui se perd dans les manipulations d’un politicien adepte de l’Ordre avec Spider-Man en bouc-émissaire. Iceberg et le Rôdeur viennent chercher des noises au Tisseur, qu’ils jugent responsable de la mort du Capitaine. Gwen, trop touchée et crispée contre Spider-Man, décide de partir à Londres, après des hésitations romantiques de Peter.
Les n°94 et 95 révèlent comment le jeune homme gère ce départ, et même comment il tente de la retrouver, en Angleterre ; sans succès. Les n°96 à 98 ramènent le Bouffon Vert, avec Norman Osborn qui retrouve hélas la mémoire et s’en prend à Peter, dont il connaît l’identité. Le n°99 montre Spider-Man stopper une émeute en prison, et mettre en avant les problèmes carcéraux déjà prégnants. Le n°100 fait un immense point sur le personnage, dans un combat intérieur intense et touchant.
Enfin, les n°101 à 102 concernent la fameuse saga où Spider-Man a six bras, qui découvre aussi le nouveau venu Morbius en s’alliant à un Lézard hybride. Les n°103 et 104 emmènent Peter et Gwen, qui lui est revenue quelques épisodes avant, en Terre Sauvage, pour un reportage avec J. Jonah Jameson, avec de mauvaises rencontres.

Un programme chargé, donc, pour une lecture massive mais agréable.
Bien sûr, le lecteur actuel peut être rebuté par quelques tics d’écriture, quelques approches parfois un peu lourdes. Pas la narration, qui demeure très fluide et dynamique, avec même des pensées de Spider-Man qui restent agréables et prenantes, pour qui ne déteste pas le principe.
Non, ce sont plus des éléments comme la caractérisation féminine, notamment Gwen Stacy, ou quelques facilités dans les combats, souvent trop aisément stoppés au profit d’un Spider-Man « trop facile ». Si la blonde préférée de Spider-Man demeure incontournable, et absolument phare de la franchise, force est de constater qu’elle incarne essentiellement une demoiselle un peu… simple. Ses réactions font girouette, et elle semble n’exister que dans sa relation avec Peter. Là où, déjà, Mary-Jane Watson a une caractérisation plus forte, plus riche, avec plus d’éléments dans son existence.
En soi, c’est essentiellement le couple Gwen / Peter qui interpelle, tant notre héros paraît brutal voire passif-agressif avec sa dulcinée, qu’il envoie souvent balader sans aucune douceur. Cela choque, quand même, et sort quelque peu de la lecture.

Des éléments à intégrer, mais qui n’empêchent pas de réellement apprécier des numéros qui ont plus de cinquante ans… et demeurent très bons !
Comme évoqué précédemment, le rythme de ces numéros est extrêmement fluide et intense. Il n’y a pas de temps mort (hormis quelques moments d’introspection un peu lourds, mais qui font partie du jeu des comics), tout est formidablement dynamique. Les événements s’enchaînent, le lecteur est pris dans un flux continu d’action, de bagarres mais aussi de rebondissements romantiques divertissants.
D’autant que, oui, ce volume est important pour le personnage, outre la mort du Capitaine Stacy, deuxième autorité morale et paternelle pour Peter, qui provoque une rupture réelle avec Gwen. L’on note la redéfinition de Black Widow, la révélation de l’identité par Peter à ses proches (même si le procédé est un peu ridicule, bien que la lecture soit intense), un retour fort du Bouffon Vert. Cela commence d’ailleurs dans un n°96 qui évoque de front le problème de la drogue, sans l’accord du Comics Code ; l’épisode n’aura pas le macaron de ce dernier, et c’est un choc réel à l’époque.
Enfin, la création de Morbius, les six bras de Spider-Man vont marquer la franchise… et cela vient en parallèle du départ de Stan Lee, qui laisse la main à son protégé, Roy Thomas. Un passage de relais fluide, pas forcément assumé alors (Stan Lee est encore évoqué dans les crédits, en parallèle de son poulain), mais marquant.

Graphiquement, Gil Kane et John Romita Sr se partagent l’essentiel des épisodes, avec l’aide de John Buscema. Des styles désormais classiques, mais fort efficaces. L’approche de John Romita Sr est révolutionnaire dans sa prise en compte des styles vestimentaires des personnages, vraiment dans le vent et proches de la jeunesse d’alors. Gil Kane est plus sûr, avec parfois des passages oniriques et des compositions multiples impressionnantes.
Un graphisme pertinent, qui accompagne bien des scénarios dynamiques et prenants.

Mon avis complet ici :
https://www.sanctuary.fr/avis/141186/

2 « J'aime »