NOUS ÉTIONS LES ENNEMIS (George Takei, Justin Eisinger, Steven Scott / Harmony Becker)

George Takei, acteur mondialement connu pour son rôle de M. Sulu dans la série Star Trek originale, grande figure progressiste américaine, dévoile dans Nous étions les Ennemis un pan méconnu de son enfance et de l’histoire américaine : l’enfermement des Américains d’origine japonaise dans des camps au lendement de Pearl Harbor. Ce roman graphique est un véritable phénomène aux Etats-Unis et sera publié le 8 avril 2020 chez Futuropolis.

Ah, encore des gens qui ont des soucis avec leur correcteur automatique.
Ou alors, ils écrivent encore moins que j’imaginais.

Jim

Ah, je ne savais pas que c’était si peu connu…

Ça avait conduit à d’importantes pénuries alimentaires : les agriculteurs japonais représentaient près de la moitié de la production californienne ! C’est ce qui a poussé le gouvernement américain à encourager le développement des jardins de la victoire.

Tori.

Oui, j’ai failli m’étonner aussi.

Jim

Pareil pour moi.
ginevra

C’est un pan de l’histoire de la 2ème guerre mondiale dont je n’ai jamais entendu parler lors de ma scolarité dans le primaire ou secondaire. Et bien qu’ayant fait la fac d’Histoire, comme je suis passée directement en 2ème année, je n’ai pas étudié l’histoire contemporaine et donc là non plus ce sujet n’a pas été abordé.
En plus n’aimant pas particulièrement l’histoire contemporaine, c’est quelques années après la fin des études que j’ai découvert ce qui se passait aux Etats-Unis à cette période.

Je pense que nous, enfants ayant grandi dans le bloc occidental (je ne sais pas ton âge, mais tu as peut-être connu la division en deux blocs voire les grandes heures de la Guerre froide, moi en tout cas j’avais fini ma scolarité et j’étais en fac quand le Mur est tombé), nous avons donc « échappé » à tous les sujets qui auraient terni l’image du « camp de la démocratie ».

J’ai l’impression que l’internement des ressortissants d’origine japonaise, je l’ai découvert dans les Green Arrow de Grell, que j’ai dû lire dans la première moitié des années 1990. Et je me souviens d’images télé, sans doute sorties d’un documentaire, et sans doute vues quelques années plus tard.

Ah, moi, j’aime bien. Même si je suis un peu nul en XIXe (sans doute parce que je ne suis pas très bon en têtes couronnées, et que justement, le XIXe s’articule autour des chutes et restaurations successives de monarchies). Mais l’histoire du XXe, j’aime beaucoup. J’aime beaucoup regarder comment les choses évoluent parallèlement et symétriquement, comment la mondialisation (notamment des guerres) génère des mouvements comparables (les grands frissons conservateurs de l’immédiat après guerre, entre 1945 et 1949, un peu partout dans le monde…), ce genre de choses. Un autre truc qui me fascine et m’intéresse (et c’est lié au sujet, ici), c’est la médiatisation (et donc la censure et l’intox qui vont avec), qui rend encore plus flagrant l’adage selon lequel l’histoire est écrite par les vainqueurs…

Jim

y’a un télefilm en deux parties sur le sujet c’est comme ça que j’ai appris ces faits Par contre le titre m’en souviens plus

J’en avais entendu parler, mais ce n’est pas n fait historique qui m’a été expliqué.

C’est notamment le sujet de Perfidia de James Ellroy, sorti en 2014 aux USA et traduit l’année suivante chez nous, et qui se passe à Los Angeles dans les quinze jours qui suivent l’annonce de l’attaque de Pearl Harbor, avec donc la question des rafles et des camps de concentration, pardon, d’internement, pour les Nippo-Américains.

C’était aussi le cadre de la seconde saison, sortie l’an dernier, de la série d’épouvante The Terror.

Mais en fait il y a des dizaines de romans (y compris pour enfants), de films, d’épisodes de série télé qui abordent la question aux États-Unis et ce depuis les années 50. (…Mais une minorité seulement ont franchi l’Atlantique. Peut-être pour la raison évoquée par Jim…) En 55, John Sturges tourne le film noir Un homme est passé (Bad Day at Black Rock), avec Spencer Tracy, qui évoque déjà le sujet avec d’autant plus de force, paradoxalement, qu’il ne montre aucun asiatique à l’écran : le personnage joué par Tracy cherche à retrouver un fermier nippo-américain dans une bourgade de l’Arizona profond, on prétend qu’il a été envoyé dans un camp après Pearl Harbor mais lui et sa famille ont en réalité été lynchés. L’année suivante sort le premier roman publié par un auteur nippo-américain, No-No Boy de John Okada, considéré depuis (à partir des années 70, en tout cas) comme un classique (il n’a jamais été traduit en français, sauf erreur de ma part) : on y suit le parcours d’un Nippo-Américain revenant s’installer à Seattle et tentant de trouver sa place dans la société après avoir passé des années interné du fait de son refus de s’enrôler dans l’armée américaine pour aller se battre contre le Japon.

Si vous avez grandi avec la saga Karate Kid, vous vous souviendrez peut-être que Mr. Miyagi est passé par un tel camp d’internement et y a perdu sa femme et son fils…

J’en parle ici :

Pour ma part, j’ai vraiment découvert cet épisode pas très reluisant de l’histoire américaine dans le film Bienvenue au Paradis de Alan Parker (avec Dennis Quaid et Tamlyn Tomita). J’avais déjà vu Un homme est passé et les Karaté Kid avant, mais Bienvenue au Paradis est l’un des premiers films qui en fait son sujet central…

Je l’ai vu assez jeune, sans doute trop jeune pour connecter les éléments. Je l’ai revu depuis, mais entre-temps, j’avais vu des images relatives à cette période (dans un documentaire, je dirais, parce que la référence à Alan Parker ne me dit rien), et ça m’a permis de redécouvrir le film (formidable) de Sturges sous une nouvelle lumière, pas seulement celle du plaisir de revoir un film que j’avais aimé des décennies plus tôt.

Plus récemment, un épisode de Hawai 5-0 aborde le sujet, mais là aussi, j’étais déjà au courant quand je l’ai vu. À vue de nez, outre les Green Arrow évoqués plus haut, je dirais que j’ai découvert l’affaire entre la fin des années 1990 et le début des années 2000. À quelle occasion, aucune idée…

Jim

Je crois que nous avons le même age, à 1 ou 2 ans près, donc oui j’ai connu tout ce que tu évoques, et effectivement, on ne parlait pas des choses « dérangeantes » qu’auraient pu faire le « camp de la démocratie » comme tu dis.

Mes périodes préférées sont l’antiquité et le moyen-âge, donc côté médiatisation à part des papyrus, tablettes, gravures sur pierres, livres et enluminures, on est pas à la même échelle que le XXe. :joy:
Mais il n’en reste pas moins que même avec ce « peu » de moyens, l’information est parvenue jusqu’à nous et que ta conclusion reste valable « l’histoire est écrite par les vainqueurs… ».

Étant normand, connaissant bien l’histoire du Débarquement, de la « guerre des haies », je sais que j’ai découvert sur le tard tout ce qui concerne l’accueil parfois violent de fermiers qui ont tout perdu sous les bombardements et qui voyaient dans les soldats américains non des libérateurs mais des envahisseurs, ou bien la place des soldats noirs dans l’armée américaine, ou encore les métissages nés soit d’unions fugaces mais sincères, soit de viols. Et les travaux des écrivains qui se sont penchés sur ce genre de questions se heurtaient à des réticences de toutes part (universités, autorités politiques, populations même…) parce que personne ne voulait que l’on remue tout cela et que l’on entache l’image du valeureux soldat américain venu se sacrifier héroïquement.

C’est la question que posent, en filigrane, Umberto Eco et Jean-Claude Carrière dans N’espérez pas vous débarrasser des livres. En gros, ils disaient (je résume et formule à gros traits) : « ouais ouais, Eschyle, Sophocle et Euripide, on dit que ce sont les meilleurs, mais surtout, ce sont ceux qui nous sont parvenus. Mais si ça se trouve, à l’époque, c’étaient les derniers de la classe ». Car oui, l’histoire effectue une sélection. Pour tout. Certaines choses sont évoquées même si elles ont disparu, et certaines autres, on ne peut que l’imaginer, ont disparu sans qu’on l’évoque.
On peut dire cela des œuvres (littéraires, théâtrales, musicales, architecturales…), mais j’imagine qu’on peut étendre le propos à n’importe quelle formulation de pensée. Par exemple, à un courant politique, contestataire ou pas, minoritaire ou pas.
Aujourd’hui, à l’heure du papier, de la collectionnite (forme un peu monolobée du cabinet de curiosité du XIXe siècle), des archives et de la numérisation, on découvre qu’il existe des petits maîtres que la postérité n’avait pas voulu retenir (heureusement que des farfelus à l’énergie inépuisable tels que Craig Yoe nous permettent de redécouvrir des gens comme Boody Rogers, genre).

Du coup, moi qui ne suis pas historien (ni par sensibilité ni par formation), j’aime bien l’histoire contemporaine justement parce qu’elle est encore bouillonnante, remuée par des gens qui vont y plonger les bras afin d’en ressortir des choses (et mon regard s’intéresse surtout à la pop culture, mais il n’y a pas que ça), proposant de changer notre perspective bien souvent. Là où des périodes plus anciennes me donnent l’impression, sans doute à tort à cause de mon regard profane, d’être plus immuables, plus monolithique. Sans doute que les changements de perception (sur le Moyen-Âge, ça a bien évolué, c’est clair) sont plus longs dans la durée.

Jim

C’est justement la raison qui fait que je n’aime pas l’histoire contemporaine. C’est trop proche, pas assez de recul.

C’est tout le sel de la recherche d’informations sur les périodes plus anciennes. Et certes, les nouvelles découvertes qui permettent d’apporter un éclairage nouveau sur certains points sont plus rares, mais elles existent, il faut juste beaucoup de patience.
Et de nos jours, en étant juste un peu curieux, et sans vouloir se lancer dans des études d’Histoire, on peut facilement trouver des informations qui complètent ce que l’on apprend en classe, même sur les périodes anciennes.

Et comme en plus j’ai une mémoire de poisson rouge, ce que j’ai appris en classe, je l’ai déjà oublié.
:wink:

Jim

9782754829540

HARMONY BECKER
JUSTIN EISINGER
STEVEN SCOTT
GEORGE TAKEI

Nous étions les ennemis

208 pages
Prix de vente : 25 €
Code Sodis : F00242
ISBN : 9782754829540

Sortie le 8 avril

George Takei est principalement connu en France pour son rôle de Sulu dans la série Star Trek . Il est aussi, aux États-Unis, une figure pro-LGBT et anti Trump très actif (il est suivi par près de 9 millions de followers sur Facebook).

Il nous livre une autre facette de sa personnalité avec cette autobiographie dessinée et revient sur son enfance passée dans les camps d’internement américains.

À la suite de l’attaque de Pearl-Harbour en décembre 1941 par l’armée japonaise, 120 000 Américains d’origine japonaise
furent emprisonnés dans des camps par le gouvernement. C’est cette expérience, vue par les yeux d’un enfant de 5 ans, qu’il nous est donné à lire aujourd’hui.

Alors que les familles des États-Unis s’apprêtent à fêter Noël, une terrible nouvelle tombe à la radio : l’attaque surprise du Japon à Pearl Harbor. Le lendemain, le 8 décembre, l’Amérique entre dans la Seconde Guerre mondiale.
Rapidement, le président Roosevelt signe un décret accordant aux commandants militaires le pouvoir d’arrêter et d’incarcérer « certaines personnes, voire toutes » d’origine japonaise, craignant la présence d’un ennemi de l’intérieur. La famille de George est américano-japonaise. Si sa mère est née aux États-Unis, son père, lui, n’a pas pu obtenir la citoyenneté alors qu’il vivait dans le pays depuis cinquante ans.
George Takei, âgé de 4 ans suit alors sa famille pour le Fort Rohwer, l’un des dix camps d’internement établis par ordre du président. Nous étions les ennemis permet de mieux comprendre le parcours de cet acteur de la série originale Star Trek . Il associe l’esprit d’aventure de son personnage de fiction à l’histoire de ses parents qui se demandaient comment survivre et prospérer dans un pays où ils étaient littéralement qualifiés d’extraterrestres.

Nous étions les ennemis sortira le 27 mai.

C’est par ce biais que j’ai connu ce fait historique. Je n’en avais jamais entendu parler auparavant…