RÉÉDITIONS DC : TPBs, Hardcovers, Graphic Novels

Bon, c’est pas le tout de causer de Marvel. Faudrait aussi parler de DC, tiens. Et c’est pas parce que le Seigneur de Babylone a déjà évoqué le premier tome de la collection Batman - The Caped Crusader que je dois me taire !

La série a été lancée à peu près en même temps qu’une autre réédition, Batman - The Dark Knight Detective. Les deux collections couvrent les séries Batman et Detective Comics à partir de l’arrivée de Denny O’Neil au poste de responsable éditorial, en gros après le cross-over Crisis. Plus précisément, The Caped Crusader reprend la série Batman. Et le tome 1 débute avec Batman #417, premier volet de la saga « Ten Nights of the Beast ».

Les plus attentifs noteront que l’ère O’Neil commence un peu plus tôt, et que les premiers récits de Jim Starlin remontent à quelques épisodes. Pour les curieux, il faut donc aller voir le recueil Batman - Second Chances qui compile les récits de Max Allan Collins et les premiers épisodes de Starlin. Le découpage, un peu étrange, peut s’expliquer par le fait que les épisodes de Collins, plus drôles et ironiques, ne rentrent pas réellement dans le canon qu’O’Neil est en train de définir, et que les deux premiers épisodes de Starlin montrent un Batman en solo, car le scénariste n’apprécie guère Jason Todd, le nouveau Robin.

Avec « Ten Nights of the Beast », Starlin rentre dans le vif du sujet. Il oppose Batman à un nouvel adversaire venu de la lointaine URSSS, KGBeast, une créature puissante mais également opiniâtre et intelligente. Un adversaire de poids pour le Détective de la Nuit. C’est un duel à mort auquel il nous invite, où KGBeast est capable de se trancher le poignet si cela peut précipiter la chute de son adversaire.

Par sa corpulence et son caractère inéluctable, KGBeast semble annoncer ce que sera Bane plus tard. Comme si O’Neil avait gardé l’idée en tête et raffiné la recette.

Les quatre épisodes de la saga, formidablement mis en valeur par les couvertures de Mike Zeck, permettent à Starlin de réfléchir à Robin. Ce dernier ne fait qu’une maigre apparition dans la tétralogie, mais il prendra une importance plus grande par la suite. Batman #421 et 422 raconte la traque d’un tueur de femme. Le sujet permet au scénariste d’aborder l’aspect juridique de ce genre d’affaire, où l’absence de preuves conduit à relâcher un assassin dont tout le monde est convaincu de la culpabilité.

L’expérience de Gordon et de Batman fait qu’ils savent quand ils sont battus et quand il faut reprendre l’enquête, repartir à la quête de preuves. Mais Robin, lui, ne se satisfait pas de cette situation, sa vision de la justice est plus radicale. À la fin du récit, c’est une femme qui parvient à tuer l’assassin. Interrogée par les hommes de Gordon, elle les met au défi de trouver un jury capable de la condamner, elle qui a débarrassé le monde d’un sadique.

Pour Robin, ça va. Il se satisfait à l’idée qu’elle puisse échapper à la prison. Pour Batman, la justice doit être pour tous. Un fossé se creuse entre le maître et son apprenti, mais c’est encore très discret.

Le sommaire passe ensuite par la case Batman Annual #12, un récit réalisé par Mike Baron, Ross Andru et Denis Rodier, où Bruce Wayne participe à une sorte de « murder party » dans la haute société. Très sympathique, plein d’idées, mais bizarrement l’excellent encrage de Rodier ne semble pas convenir à Andru.

Batman #423 constitue une espèce d’exception dans le monde très noir qu’explorent O’Neil et Starlin, puisqu’il traite du thème de l’enfance malheureuse, mais avec une forme de sourire, d’optimisme et de confiance en l’avenir qui tranche avec le reste. On y voit même Batman verser une larmichette, ce qui fait de ce numéro une sorte de pépite rare.

Batman #424 et 425 constituent le développement des indices jusque-là disposés autour de Jason Todd. Le Duo Dynamique croise le chemin d’un homme violent qui terrorise les femmes, mais qui parvient à échapper à la justice à cause de son immunité diplomatique. Robin le traque et, quand Batman arrive, l’homme a basculé de son balcon, tombant dans le vide. Jason ne semble ressentir aucun remords, et Batman a des doutes. La faille entre les deux se creuse.

La deuxième partie de ce récit montre la suite du récit : le père de Felipe, afin de venger son fils et d’atteindre Robin, capture Gordon, un Gordon grisonnant, assez fidèle à la version pré-Crisis. Batman tente de faire comprendre à Robin que les causes ont toujours des conséquences, mais rien n’y fait, le justicier juvénile semble avoir son idée bien arrêtée de la justice.

C’est la manière qu’à trouvé Starlin pour rendre le nouveau Robin intéressant à ses propres yeux. Et personnellement, je trouve assez fort de mettre dans l’esprit d’un ado, qui devrait être un personnage souriant, enjoué, optimiste, une telle vision de la justice, presque manichéenne, en tout cas impitoyable. Ce durcissement du personnage, palpable en comparaison de l’approche Collins et surtout de la période pré-Crisis, ne semble toujours pas emporter les suffrages.

Le recueil ne reprend pas les quatre épisodes de Death in the Family, souventes fois réédités (mais bon, c’est pas une raison pour ne pas reluquer une belle couverture de Mignola). Pour les nouveaux venus, il s’agit du récit durant lequel Robin, à la recherche de sa mère, est violemment agressé par le Joker, qui le laisse pour mort : le sort du jeune homme, dans le dernier épisode, est soumis aux votes des lecteurs qui choisissent, en fait, de ne pas faire survivre le jeune apprenti.

Le recueil reprend à Batman #430, dernier épisode de Starlin, très bien mis en scène par Jim Aparo. Batman est confronté à un sniper fou. Tandis que des souvenirs douloureux lui reviennent, il se montre sans pitié. Quant à Gordon, dont Starlin laisse entendre qu’il soupçonne des choses, mais est-ce au sujet de Robin ou de l’identité même du héros, il ne peut que constater que le Croisé à la Cape a changé. De bien belles subtilités pour un épisode tout en finesse.

Le dernier épisode, écrit par James Owsley et dessiné par Jim Aparo, confronte Batman à son passé en la personne de ninja, au fil d’une enquête où on le voit accumuler les indices et croiser les informations.

Un véritable détective, accessible aux émotions, qui se confronte aux problèmes de la société et qui est entouré d’un casting, certes peu nombreux, mais présent. On a vraiment l’impression, en parcourant ce recueil, de lire un tout autre Batman.

Jim

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