RÉÉDITIONS DC : TPBs, Hardcovers, Graphic Novels

Non, il y en a, mais pas que. On retrouve aussi du Greg Land des débuts, ou encore Matt Haley

J’ai récemment déniché le recueil compilant la série Night Force, de Wolfman et Colan, publiée chez DC en 1982-1983.

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Sous une couverture recolorisée (et sur jaquette), l’éditeur propose une très belle reliure et surtout une colorisation fidèle à l’originale, ce qui fait du bien dans la période révisionniste que vit l’édition, où il faut tout recoloriser pour mettre au goût du jour.
M’enfin.

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Le tome comprend le chapitre initial (qui avait été publié en bonus dans un épisode de New Teen Titans) ainsi que les quatorze chapitres réalisés par le tandem. Et c’est un régal. Des histoires surnaturelles somme toute assez classiques (même si le trait de Colan permet de rendre horrible le moindre truc et constitue un bonus évident), qui seront éclipsées par l’approche plus insidieuse de Moore sur Swamp Thing, mais qui valent surtout pour les personnages.

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En effet, Wolfman (encore avec Colan), avait testé une formule qui fonctionnait bien dans Tomb of Dracula, chez Marvel, mélangeant des personnages parfois idéalistes, parfois cynique. L’influence de cette série sur Night Force semble évidente (la présence d’un personnage nommé Van Helsing en atteste), avec un Baron Winter qui remplace le Comte Dracula dans le rôle de l’aristocrate énigmatique détenteur de secrets.

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L’ensemble est assez magnifiquement dessiné, et alterne les variations sur des thèmes classiques (possession, hantise). La conclusion, à l’occasion d’un voyage dans le temps, permet de mettre l’accent sur le Baron.

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Un magnifique pavé dans lequel je vais me replonger avec gourmandise.

Jim

Plonger dans un pavé, ça doit faire mal…
C’est le pavé que certains lancent dans la mare ?

Tori.

Y a Lando ?

Non. Mais y a Jaxxon.

Jim

Je connais la reprise d’Aquaman par Peter David de loin, comme beaucoup de comics des années 1990, surtout chez DC. La réédition en pavés épais, sous le titre générique Aquaman by Peter David, est donc l’occasion de rattraper mon retard.

Pour résumer, cette reprise se fait en plusieurs temps. En premier lieu, le scénariste écrit les Chronicles of Atlantis, une série illustrée par Esteban Maroto, afin de redonner du lien à l’univers sous-marin de DC. Je n’en ai que quelques numéros épars.
Ensuite, il rédige la mini-série Aquaman: Time and Tide, parue au début 1994, dessinée par Kirk Jarvinen (de manière très agréable d’ailleurs : influencé par Art Adams, il livre ici une prestation qui n’est pas sans me rappeler le travail de Kieron Dwyer. Et dans ce récit, Aquaman rédige ses mémoires, ce qui permet de compléter le tableau de la réécriture du personnage, en racontant sa jeunesse, sa formation, ses rencontres.

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Bon, ça, j’avais lu dans la précédente édition en TPB qui remonte à de longues années, et j’avais bien aimé. Et revanche, j’étais à l’époque, et je le suis encore, assez perplexe devant l’apparente nécessité de réécrire les origines. Plutôt que d’être le fils d’un gardien de phare et d’une reine atlante, le héros devient un enfant sauvage d’origine mythologique élevé par des dauphins. Allez comprendre.

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Et en fait, je crois que j’entretiens à l’égard de cette version une relation ambiguë. J’aime bien le travail de Peter David sur cette série, mais je trouve les choix fondamentaux assez discutables, qu’il s’agisse des origines revues ou de la perte de sa main.

Car, dans la foulée de la mini-série, une série mensuelle est lancée, juste avant l’événement Zero Hour. Déprimé et en quête de lui-même, Aquaman (assisté d’Aqualad) est convoqué par l’armée américaine afin d’enquêter sur l’épave d’un sous-marin atomique qui pollue les eaux. C’est là qu’il rencontre Charybdis, un éco-terroriste assez intéressant mais visiblement créé pour l’occasion et aussitôt abandonné. Si le héros s’en sort, sa main est rongée par des piranhas aux ordres du méchant (qui cherche à voler à Aquaman ses pouvoirs mentaux sur les habitants des océans). Arrive le n°0, qui rappelle les grandes étapes de la vie du personnage et introduit le crochet.

Les épisodes suivants tournent autour du mystérieux contact que les héros rencontrent au sein de l’armée, de bastons avec Superboy et Lobo (occasion d’une petite réflexion sur la chasse) et d’un conflit avec les Deep Six (dont on apprend le mode de reproduction) qui conduit à l’apparition d’une nouvelle élémentale du feu, une ancienne flamme d’Aquaman et mère de ce qui semble être son fils.

Ça va vite, Peter David balance plein d’idées, ça part un peu dans tous les sens, ça resitue personnages et thèmes centraux au sein de l’univers DC, mais l’ensemble donne aussi l’impression que ça avance à tâtons. C’est sans doute une vision a posteriori de ce travail, mais force est de constater que, sur Hulk, le scénariste a régulièrement imposé des fils rouges (la chasse aux armes atomiques, la transformation en Joe Fixit, l’apparition du Panthéon) qui donnent de la cohérence et une direction au titre. Pour l’instant, à hauteur des huit épisodes contenus dans le premier volume, on ne sent pas le même effet. Ayant également pris le tome suivant, je vais poursuivre ma lecture, agréable, mais pas emballé.

Peter David sait animer ses personnages. Garth, en amoureux transi de Dolphin, est très drôle. Les méchants sont en général très bien écrits. De même, il trouve des astuces amusantes pour les animaux marins, dont les pensées sont accessibles aux lecteurs par le biais des pouvoirs d’Aquaman : ça nous vaut quelques scènes savoureuses avec les requins, nettement plus benêts que ce que l’on pourrait croire en regardant Les Dents de la mer.

Question dessin, Kirk Jarvinen est remplacé par Martin Egeland, lui aussi influencé, dans le meilleur des cas, par Art Adams, mais qui propose des corps disloqués et des décors absents. Il est remplacé parfois par Jim Calafiore, un dessinateur au style étrange donnant l’impression que tout est réalisé à la règle et à l’équerre. Autant dire que la série n’est pas la mieux dessinée du catalogue, à l’époque.
Rendez-vous bientôt pour un commentaire sur le tome 2.

Jim

Le deuxième tome de la série Aquaman by Peter David couvre une période (de l’épisode 9 au 20) plus nerveuse. Les choses sont mises en place, et le scénariste peut dérouler son intrigue.

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Qui tourne autour d’une vacances de pouvoir et d’une possible lignée du héros. Grosso modo, la cité de Poseidonis souffre de séismes à répétition, et l’on découvre qu’elle est construite sur une structure souterraine restée inexplorée depuis que les légendes affirment qu’elles recèlent des choses horribles. Aquaman, de son côté, se met en tête de retrouver les autres cités atlantes perdues et de les unifier en prévision d’une invasion prophétisée. Là-dessus, Mera revient alors que le héros a entamé une relation avec Dolphin, et l’ancienne reine ne semble pas en possession de tous ses moyens.

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Le scénariste profite du fait qu’il y ait beaucoup de personnages pour lancer différentes intrigues. Le fils illégitime d’Aquaman, par exemple, réveille la folie des grandeurs des différents monarques qui se sentent menacés par sa présence. Mera cache des souvenirs enfouis dans sa mémoire troublée. Le trône est convoité par Thanatos (un double maléfique d’Aquaman, dont le retour dans la série n’est pas super limpide pour qui ne connaît pas les précédentes séries du héros), qui parvient à s’incarner dans ce monde, mais qui est pris pour cible par le Major Disaster, lui-même persuadé de frapper le justicier marin.

Bref il se passe plein de choses, même si parfois les motivations des personnages voire leurs raisonnements mériteraient des explications plus claires (tout ce qui tourne autour de l’Amiral Strom est un peu rapide, quand même).

Graphiquement, ça va vite, Martin Egeland et Jim Calafiore fournissant des pages pleines d’actions, mais un peu vides en matière de décors. Les designs de monstres et de races exotiques sont fonctionnels, mais pas géniaux. La série souffre d’une vraie ambition visuelle.

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Bah quoi, ils ont fait de l’eau … Y a pas de décor dans un verre !

Kilékon.

Jim

Flatteur

Peut y avoir des glaçons. et une paille, voir un palmier pour des cocktails ou alors si on veut faire espionnage un cure-dent avec des olives.

Je n’ai jamais vraiment compris le personnage Thanatos.

J’avoue que je n’avais pas connecté les infos, et quand il est apparu dans la série de Peter David, je n’ai pas compris tout de suite qui c’était. Je crois vaguement avoir lu l’épisode dessiné par Cardy dans lequel il apparaît, et il me semble que je n’ai pas lu la série qui précède celle de David, et dans laquelle il apparaît. Du coup, l’effet que cela aurait pu susciter en moi ne fonctionnait pas.
En gros, si je comprends pas, c’est un « reflet maléfique », au sens premier : il a été « créé » par le truchement d’un miroir (qui est, dans la version de David, une porte dimensionnelle), et il prend la personnalité de celui qui s’y reflète.
Le plus déconcertant dans la version de Peter David, c’est que le personnage apparaît et complote afin de s’incarner dans le monde réel, et une fois arrivé, il est pris pour cible par le Major Disaster. Et du coup, il y a une ironie mordante, une fausse piste narrative, mais tout cela est un peu tombé à plat pour moi. Sans doute par méconnaissance du personnage. Sans doute aussi parce que c’est très bien amené, j’ai l’impression.

Jim

Oui, c’est ce que j’ai compris, mais… bon, c’est d’une part absolument pas claire, et ça « pue » quand même la mauvaise idée, tout ça.
Merci !

Ne connaissant pas bien l’historique du personnage (j’ai dû lire la VF de l’épisode de Cardy dans un pocket Aredit, mais c’est loin…), j’ai du mal à voir l’apport de David. Et ensuite, je pense qu’il voulait donner une fausse piste, mais la réalisation ne m’a pas convaincu. D’ailleurs, je trouve que le problème, dans la série, c’est qu’Aquaman (avec Dolphin) bouge beaucoup, mais que les gros trucs arrivent quand il n’est pas là. David semble aller trop vite, évacuer vite ses vilains afin d’aller encore plus vite à l’intrigue suivante. C’est bien à lire sur le moment, mais ça laisse un sentiment de flou, un peu comme le Tour de France qui passe dans le village : on l’a vu, il est passé, mais on n’a pas reconnu les coureurs, ils allaient trop vite.

Jim

Il aime bien Thanatos le père David, il nous l’avait refourgué aussi dans ses cap marvel.

Qu’est-ce que c’est drôle ce moment où Ronan se fait clasher par son ex (juste un plan cul selon elle).

Quand John Byrne quitte Action Comics, après le numéro 600 qui permet à l’auteur de boucler son intrigue romantique entre Superman et Wonder Woman et de clore la période durant laquelle le titre est un « team-up book », la direction de DC a une idée saugrenue : transformer sa série fondatrice en anthologie hebdomadaire.

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La parution propose donc plusieurs séries, installées sous la forme d’épisodes à suivre, parmi lesquelles on pourra noter Deadman ou Green Lantern (qui perd à l’époque son droit à un titre à son nom…). Et Superman, quant à lui, récupère une place particulière : sa série ne fait plus que deux pages, et se trouve au centre du sommaire (un strip « centerfold », en quelque sorte). Drôle de condition : le défenseur de Metropolis se retrouve au centre du magazine qui l’a vu naître, mais n’a droit désormais qu’à deux pages toutes les semaines.

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L’expérience éditoriale est donc bizarre.
Aux commandes de ce feuilleton, on retrouve Roger Stern, soutenu par Mike Carlin depuis son départ de Marvel (où il animait pourtant avec talent Avengers depuis des années, ayant refait du titre un pilier de l’écurie, mais visiblement, Gruenwald n’avait pas la même appréciation de son travail), et le vétéran Curt Swan, qui avait marqué le personnage dans les années 1960, 1970 et 1980. À l’encrage, on croise le nom de John Beatty, un artisan d’une propreté exemplaire qui avait déjà sublimé le trait de Mike Zeck sur Captain America, puis Murphy Anderson, sans doute l’une des plus belles associations de l’Âge d’Argent. La narration façon Swan est limpide et élégante, malgré un trait qui se raidit un peu (le monsieur n’est plus tout jeune à l’époque). La construction en doubles pages donnent à l’ensemble l’allure d’un strip de presse, et c’est assez agréable.

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Le récit est simple : Superman sauve un homme d’une tentative d’attentat. Il s’avère que ce dernier, Bob Galt, est un adepte d’une religion dont le héros est le dieu, le messie, le sauveur. Les adversaires qui tentent de le faire taire sont des industriels peu scrupuleux, dont on découvre au fil du récit qu’ils sont eux-mêmes guidés par une foi haineuse, à l’inverse de Galt. Celui-ci présente à Superman les autres membres de sa secte, et un conflit surgit, permettant de présenter l’être qui attise les haines (et, au passage, confère des pouvoirs aux croyants, ce qui renforce leur foi).

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Le récit aborde donc l’aspect religieux que peut revêtir la présence d’un surhomme sur Terre. C’est plutôt bien joué, rapide dans le déroulement, et ça connecte l’ensemble à l’univers DC, ce qui évite d’avoir un récit hors continuité qu’on pourrait oublier facilement.

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L’expérience éditoriale dure moins d’un an. Au bout de quarante numéros, Action Comics redevient un comic mensuel avec un seul personnage (et Stern en deviendra le scénariste régulier, apportant sa compétence et son bon sens au personnage, pour le résultat que l’on sait). L’intrigue principale est bouclée, sur une demi-victoire du héros, quelques épisodes avant la fin, les derniers chapitres étant consacrés à un thème voisin, celui de la dislocation de la société sous l’effet du racisme, de la haine et de la peur. Difficile de dire, de longues décennies plus tard, si Stern avait prévu de lancer une autre intrigue avant que la décision de rechanger la formule tombe, ou si les ultimes développements sont la conclusion prévue.

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Le TPB The Power Within compile ce feuilleton, ainsi qu’un récit en trois parties, publié des années plus tard à cheval sur Superman, Adventures of Superman et Action Comics. Cette dernière histoire, écrite par William Messner-Loeb, met en scène le jeune Davood, fils d’immigrés quraquiens, qui se retrouve en possession d’une ceinture augmentant les pouvoirs naissants qu’il a hérités à la suite de l’Invasion. Or, Luthor convoite l’objet et utilise la peur et la haine envers les immigrés arabes pour le récupérer.

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Là encore, le dessin est assuré par Curt Swan, cette fois-ci encré par Dennis Janke (excellent mélange). Mais le dessinateur n’est pas le seul point commun des deux publications. Le fil directeur, c’est la haine, et notamment la haine envers l’arabe. En cela, la « trilogie Sinbad » est la suite directe du feuilleton écrit par Stern. Et si la démonstration est rocambolesque et spectaculaire, ainsi qu’on peut s’y attendre dans un comic, le propos est terriblement d’actualité. Nous sommes en 2019, le TPB est sorti en 2015, les bandes datent de la fin des années 1980 et du début des années 1990, mais plus que jamais, elles parlent de l’Amérique d’aujourd’hui.

Jim

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Je vois le nom de William Messmer Loeb, il fait quoi dans le tout ? J’apprécie assez ce qu’il a fait même s’il est souvent associé au pire des 90’s

Hmm…
Tu as lu la chronique ?

(bon, je rajoute un adjectif dans le texte, pour aider, mais tout de même, c’est assez clair…)

Jim