M’apercevant que je n’ai évoqué que le premier des trois TPB Cloak & Dagger couvrant la période Mantlo, je m’empresse de rattraper le retard.
Nous en étions restés, donc, aux premières apparitions du tandem, d’abord dans les pages de Peter Parker the Spectacular Spider-Man (par Bill Mantlo, aidé d’Ed Hannigan puis Al Milgrom), puis à la mini-série qui leur est consacrée, et enfin à leurs passages divers dans d’autres séries, dont New Mutants.
Forts de leur succès, les deux héros de la nuit, toujours embarrassés de leurs pouvoirs, ont droit à une série régulière. Le recueil Lost and Found compile donc les onze numéros de cette série et les deux premiers chapitres du feuilleton auquel la Cape et l’Épée auront droit dans les pages du nouveau Strange Tales (aux côtés de Doctor Strange, qui lui aussi perd sa série régulière au même moment).
Les affaires commencent de manière classique : on retrouve les deux héros, les quartiers chauds dans lesquels ils tentent de faire régner la justice, les autres acteurs secondaires de la mini-série (le curé qui les héberge, la fliquette qui les traque…), ainsi que les trois auteurs : Bill Mantlo au scénario, Rick Leonardi au dessin, dont le style est désormais bien affirmé, et Terry Austin à l’encrage, qui sait équilibrer les cases pleines de décors et de matières et les surfaces lisses et stylisées (citons également le formidable travail du lettreur Ken Bruzenak). Mais au cours de ce premier épisode, alors que l’intrigue explore la misère affective et le commerce sexuel qui agitent un microcosme cruel, la révélation se fait : la mission que les deux jeunes gens se sont donnée les a changé en monstres. Tandy décide donc de quitter l’équipe, espérant reconquérir sa vie.
Dans le deuxième épisode, elle retourne chez elle, uniquement pour découvrir que la famille riche de laquelle elle provient se complaît dans le même genre de débauche que ce à quoi les deux anciens fugueurs ont récemment été confrontés. Pour Mantlo, en plus de donner un passé et une épaisseur à son héroïne, cela revient à donner à la série un ton résolument désespéré. Les deux héros reprennent donc leur croisade dans le troisième épisode, retournant à New York pour y croiser un certain tisseur de toile. Le quatrième épisode marque la rencontre avec le Beyonder, dans l’un de ces « tie-ins » qui coupent l’élan de toutes les séries Marvel dans le cadre de Secret Wars II.
En ce qui concerne le mensuel Cloak & Dagger, c’est bel et bien le cas : Leonardi quitte le navire (il reviendra pour le numéro 6). Commence alors une valse de dessinateur dont aucun ne démérite (c’est même plutôt joli dans bien des cas), avec Terry Shoemaker (#5), Marc Silvestri (#7), Mike Mignola (#8), Art Adams (#9), Bret Blevins (#10) et June Brigman et Larry Stroman (#11). De son côté, Mantlo se montre généreux. Le détective Brigit O’Reilly, qui poursuit les deux héros depuis le début, décède, et Dagger tente de la ranimer, mais ces efforts conduisent à ressusciter la policière sous la forme d’une femme verte nantie de pouvoirs. Comprenant qu’ils perdent pied et que leurs actions ont des conséquences aussi dangereuses qu’imprévisibles, les deux héros décident de quitte New York. S’ensuit un long voyage à l’étranger (Carl Potts, l’editor, se dit peut-être, à ce moment-là, que le thème du voyage, s’il a si bien fonctionné pour Uncanny X-Men, peut sans doute aussi sauver la série), où les héros se rendent en Europe, passant de pays en pays et rencontrant même Doctor Doom. Le dernier épisode est double, signe que la série est fermée de manière précipitée.
À l’arrêt de la série, l’ensemble du personnel créatif se déplace dans les pages de Strange Tales, une anthologie calquée sur son glorieux homonyme et rassemblant également la nouvelle mouture de Doctor Strange. Bret Blevins s’installe pour une suite d’épisodes dont les deux premiers sont compilés ici, et dont la structure est comparable au mensuel précédent, à savoir que Cloak & Dagger voyagent, rencontrent des gens et résolvent des problèmes.
Faire quitter New York aux héros a pu paraître un moyen de relancer l’intérêt de leurs aventures, mais ça en dilue la personnalité. Le feuilleton à base de petits épisodes d’une dizaine de pages noie les deux héros dans la production, et malgré la qualité du dessin (Blevins en pleine forme), les héros semblent avoir perdu un peu de leur charme.
Jim