REALISATEUR
Phil Tucker
SCENARISTE
Wyott Ordung
DISTRIBUTION
George Nader, Gregory Moffett, Claudia Barrett, George Barrows…
INFOS
Long métrage américain
Genre : science-fiction
Année de production : 1953
Les critiques américains Michael et Harry Medved sont principalement connus pour leurs livres consacrés aux plus grands ratages de l’histoire du cinéma. Ce sont ces deux frangins qui ont fait du fameux Plan 9 from Outer Space de Ed Wood le « le plus mauvais film de tous les temps » (et même si on peut trouver encore pire…si si, c’est possible…je ne peux franchement pas leur donner tort) dans leur ouvrage The Golden Turkey Awards sorti en 1980. Et c’est d’ailleurs ce classement qui a permis à de nouvelles générations de redécouvrir l’oeuvre d’Ed Wood.
Dans les pages de The Golden Turkey Awards se trouve un autre film qui aurait très bien pu recevoir cette distinction…mais qui a finalement remporté un autre prix bien mérité, celui de « monstre le plus ridicule » : Robot Monster de Phil Tucker.
Robot Monster est un film de science-fiction indépendant réalisé pour une bouchée de pain en 1953 par un jeune metteur en scène débutant nommé Phil Tucker. Avec 16.000 dollars en poche et un scénario signé Wyott Ordung (qui se fera un tout petit nom dans le cinoche bis des fifties, notamment en réalisant l’année suivante Monster from the ocean floor, la toute première production de Roger Corman, et en co-signant le scénario de Target Earth), Tucker emmena pendant quatre jours une poignée d’acteurs dans les décors naturels de Bronson Canyon, site aperçu dans d’innombrables productions télé et ciné.
Parce qu’il n’avait pas assez d’argent pour se payer un monstre élaboré, Phil Tucker fit appel à son ami comédien et cascadeur George Barrows, qui s’était confectionné un costume de gorille. L’extra-terrestre Ro-Man, envoyé sur Terre pour anéantir l’espèce humaine à lui tout seul avec son rayon de la mort, a donc un corps de gorille mangé aux mites (!), avec un casque de scaphandrier surmonté de deux antennes de télé en guise de tête (!!). Et pour le rentabiliser au maximum, Barrows ne quitta pas cet accoutrement hirsute pour camper son supérieur qu’il contacte au moyen d’une machine à faire des bulles (!!!).
Preuve supplémentaire que Robot Monster a été tourné avec l’équivalent du budget d’une seule explosion d’un film de Michael Bay (et encore…), toutes les scènes à effets spéciaux sont des stock-shots provenant d’autres longs métrages.
Dire que le scénario de Robot Monster manque de cohérence est un doux euphémisme. Il évoque par moment celui des Envahisseurs de la Planète Rouge sorti la même année (avec dans les deux cas, un jeune garçon qui découvre une invasion extra-terrestre et le même rebondissement final)…mais la comparaison s’arrête là (car le film de William Cameron Menzies est réussi, lui).
L’interprétation est catastrophique, la direction d’acteur est aux abonnés absents, les dialogues sont (ridiculement) pompeux, les pseudo-explications scientifiques sont hautement fantaisistes, les faux raccords abondent, le rythme est inexistant (pour meubler, le réalisateur larde sa pelloche de plans de Ro-Man déambulant dans Bronson Canyon)…Robot Monster ne dure que 62 mn et pourtant le temps se fait terriblement long (un carton « entracte » apparaît au bout de 30 mn…ce qui devait permettre aux spectateurs les moins endurants de quitter la salle et de ne jamais revenir…pour arroser les fleurs ou sortir le chien)…
L’utilisation des stock-shots se fait en dépit du bon sens…nous sommes dans les années 50 et voilà t’y pas que des dinosaures apparaissent lorsque le rayon de la mort extra-terrestre touche la Terre (gros lézards tirés de Tumak, fils de la Jungle, de Lost Continent et même de la version muette du Monde Perdu). Les ruines de New-York viennent de Captive Women (1952) et la base spatiale de Vingt-quatre heures chez les Martiens est utilisée pour représenter la planète de Ro-Man.
Et l’Oscar du recyclage va à…
Après presque une heure de grand n’importe quoi, Phil Tucker et Wyott Ordung nous pondent un twist aussi crédible qu’un cliffhanger de Dallas…et qui rétroactivement, explique pourtant bien des choses…comme le fait que l’histoire donne l’impression d’avoir été imaginée par un enfant de 8 ans !