Récemment (bon, c’est dans le cadre de la traduction d’épisodes de Tom Strong, mais chut, je vous ai rien dit), je resongeais à la discussion qu’on a eue au sujet de l’influence de Moorcock sur les comics. Et je me disais que, au final, c’est peut-être au niveau des univers parallèles et des versions alternatives que c’est le plus sensible.
Bon, les versions alternatives de personnages, c’est pas une idée nouvelle dans le monde des super-héros. Umberto Eco en parlait quand il évoquait les « untold tales » et les « imaginary stories » (visant essentiellement Superman, mais on peut élargir), et ce grand esprit se référait assurément à une période que Moorcock (et d’autres, je pense à Zelazny) ont dû lire dans leur jeunesse. Donc les versions parallèles des héros, ça ne date pas de ces deux écrivains (et quelques autres). Mais Moorcock, avec son « Multivers », a imposé l’idée qu’on pouvait trouver des versions à géométrie variable du même personnage.
Et là, avec les mondes parallèles (appréciés par Roy Thomas, lui-même inspiré du système Terre-1 / Terre-2 instauré dès 1961 dans Flash #123), on a un équivalent. Des concepts comme le « what if » chez Marvel ou le « Elseworld » chez DC viennent directement de là, ce dernier raffinant la sauce un peu plus.
Au-delà des épées enchantées, des objets maudits, des artefacts parasites d’un côté, et des mondes alternatifs de l’autre, je crois que l’expression la plus moorcockienne du super-héros, on la doit à Alan Moore, qui décidément aura marqué son époque à plein de niveaux. Je n’ai pas en tête l’ensemble des aventures du Captain Britain, ni l’ordre d’icelles, mais durant la période Moore, on a droit à une déclinaison intéressante du corps d’élite, et à l’apparition (suggérée ou non) de versions alternatives de mondes et de personnages (le motif du phare reprend celui de la tour qu’on trouve dans Une chaleur venue d’ailleurs, ce qui me semble éloquent).
Et je crois qu’on ne dira jamais assez l’impact qu’a eu ce concept sur l’ensemble de la production, qu’il s’agisse bien entendu des X-Men de Claremont (qui adore montrer des versions alternatives de ses personnages), mais aussi d’épisodes de séries telles que Authority, par exemple.
Et à bien y réfléchir, je crois qu’il est là, l’apport le plus moorcockien aux comics.
Jim