TUMATXA : L'ÉMISSION !

Et à juste titre puisque après une rapide recherche, Tynion confirme (dans une interview pour le site d’Entertainment Weekly) l’influence de la série de Lynch et Frost sur son travail :

« Those early men in black stories are still very scary. Everyone has the image of the men in black from the Will Smith movies, but the classic stories are the ideas that most directly shaped a lot of « Twin Peaks », like the lodges and the red room. I’m getting into tap into a lot of esoteric concepts that I’ve always been fascinated by. Now I get to play with them all in a book that is a great excuse for doing a lot of weird and interesting research. »

Ha ha ha !! Un peu gonflé mais tentant, oui. Car il faut bien dire que des fictions à caractère « holistique » comme « Twin Peaks », « Departement Of Truth » ou tout ce qui a trait à la saga Imaginos dans le corpus de Blue Öyster Cult (mais on pourrait trouver d’autres exemples) appellent ce genre de recoupements, par nature j’ai envie de dire.

EPISODE 21 : Le cowboy à l’oeil exstatique !!

Mine de rien, on rigole beaucoup dans « Tumatxa! » cette semaine : sous des atours sombres ou sentencieux, les objets qui nous intéressent ce soir invitent en fait discrètement à la poilade franche et assumée, ou à tout le moins s’adonnent au pastiche pince-sans-rire…

Série télé, BD, littérature, musique : pas tout à fait la formule classique, mais presque.

Au rayon série télévisée, évoquons ensemble le dernier effort du cinéaste danois tête-à-claques préféré de Télérama, Nicolas Winding Refn (la trilogie « Pusher », « Valhalla Rising », « Drive » évidemment…). Après le très aride « Too Old To Die Young », l’ex-beau-frère de Brigitte Nielsen (eh oui) revient au format télévisuel mais dans son pays d’origine cette fois, avec « Copenhagen Cowboy », récit de vengeance quasi mythologique en 6 épisodes où une jeune femme toute frêle et menue met sa pâtée à un ramassis de couillards plus abjects les uns que les autres. Spécial, mais beau à s’en crever les rétines et les tympans, et tout ça en se prenant bien moins au sérieux qu’il n’y paraît.

Pour la BD, un très gros morceau ce soir (dans tous les sens du terme) avec l’omnibus « X-Statix » tout récemment paru chez Panini. Dans cette insolente réussite du Marvel du début des années 2000, Peter Milligan (au scénario) et Mike Allred (au dessin) revitalisent le titre « X-Force » (bientôt rebaptisé « X-Statix ») à la faveur d’une satire jouissive de la « celebrity culture » de son temps. Récit tour-à-tour tragique et hilarant qui tape juste et qui fait mal, « X-Statix » est une bombe, point barre.

Pour la littérature, comme nous l’avions teasé la semaine dernière, penchons-nous donc sur « L’oeil du purgatoire », incroyable roman de science-fiction signé Jacques Spitz. L’auteur nous y raconte la déchéance d’un artiste-peintre raté, mais convaincu de son propre génie, qui se retrouve cobaye involontaire d’une drôle d’expérience scientifique, dotant sa vision de la faculté de « voyager dans le temps ». C’est très drôle tout en étant très noir, et subitement, sur la fin du roman, on ne rigole plus du tout. Du grand art… et quel style, ce Spitz !!!

Le tout profite du voisinage d’une sélection musicale de qualité, comme il se doit : les toulousains de BRUIT ≤ ont sorti il y a deux ans un premier album fabuleux dont est issu le beau et puissant « Industry », et on est bien cons d’avoir attendu aussi longtemps avant de s’envoyer la chose ; Julian Winding, neveu de NWR, participe à la BO de « Copenhagen Cowboy » avec le roboratif « Undead Is The New Red » ; Christopher Adams alias PENDANT a sorti un merveilleux album l’an dernier, « Harp », dont est extrait le puissant « Thorn », aux relents Beastie Boys-esque ; enfin, le groupe death/doom/dream/pop (ou « dream-doom », oui oui ça existe, la preuve) Dream Unending vient de nous faire le cadeau de son deuxième album « Songs Of Salvation », et l’épique « Ecstatic Reign » en est le morceau conclusif…!!!

« God in the form of time
Deprived of temporal lies
Shame’s anointed truth
Washed over in most stunning pain »

EPISODE 21 !!

Image Copenhagen Cowboy

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Image oeil du purgatoire

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Pas de surprise finalement sur le contenu du coffret Tsukamoto (le sommaire des films est identique à celui du coffret Arrow sorti il y a quelques années):

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Carlotta films planifie également une sortie cinéma limitée pour la mi-mai.

Et Spectrum films prévoit tout de même de sortir Gemini en blu ray, sans date annoncée pour l’instant.

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Ah, donc, c’est pour ça que tu nommais Jacques Spitz dans l’entretien de la semaine dernière. Je m’étais dit que c’était surprenant (bien que tout à fait valide, hein) de l’évoquer comme représentant de la SF à la française.

Bon, et sinon, le chapitrage: 2023.03.22 - (3:05) BRUIT ≤, (24:55) Nicolas Winding Refn, Copenhagen Cowboy, (1:16:06) Julian Winding, (1:26:48) Peter Milligan, Mike Allred, X-Statix, (2:05:11) PENDANT, (2:11:30) L’oeil du purgatoire, Jacques Spitz, (2:38:09 Dream Unending

Merci !!! :slight_smile:
Concernant Spitz, c’est Clément Milian qui l’a amené sur le tapis en premier lieu, pas forcément pour en faire un représentant de la SF à la française (j’imagine que son travail est un peu trop singulier pour ça), mais pour dire que la littérature de genre à la française recélait bien des trésors cachés, qu’il s’agit de réexplorer…

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…et c’est du coup un sacré morceau, en effet !! Excellente sélection, même s’il est un peu dommage de ne pas y retrouver « Fires On The Plain »… ça reste quand même très conséquent et très représentatif de la substantifique moëlle du boulot de Tsukamoto.

Bon sang, j’espère que j’aurai l’occasion d’en voir un ou deux en salles, de ces quatre films qui ressortent…

:rofl: :rofl: :rofl: Je suis impatient de jeter une oreille sur ce morceau! :rofl: :rofl: :rofl:
Ca ne devrait d’ailleurs pas tarder! :laughing:

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En fait, comme je le signale durant l’émission, au final ça fait surtout penser à une variation sur le death/doom gothique des Peaceville Three (c’est-à-dire Anathema, My Dying Bride et Paradise Lost), mais bon, comme j’aime beaucoup ces groupes, ça me va très bien !!

Ça devrait bien se passer alors! :grin:

EPISODE 22 : Le Samouraï tarantinesque en feu !!

Avant-dernière émission de « Tumatxa! » avant la traditionnelle pause pascale !! Ce soir on parle beaucoup de cinéma, mais pas que…

Pour la littérature : on se penche ce soir sur le deuxième et dernier livre en date de Quentin Tarantino (après son « Once Upon A Time In Hollywood », la novélisation de son propre film), qui se nomme « Cinéma Spéculations ». Comme le titre de son ouvrage l’indique, le cinéaste américain nous livre ici une série de réflexions un brin foutraques mais plutôt jouissives sur des cinéastes et des films, essentiellement des années 70, qui ont emballé le jeune « Little Q ». Au menu : Paul Schrader et Don Siegel (beaucoup), Martin Scorcese et Sam Peckinpah (un peu), Brian de Palma (pas mal), Steve McQueen, Clint Eastwood, Tobe Hooper, Stallone et j’en passe… Difficile de nier le fait que Tarantino connaît bien son sujet, même si son livre part un peu dans tous les sens… mais le contraire eut été étonnant !!!

Pour la BD : retour sur un chef-d’œuvre, en l’occurrence l’orgasmique « Ronin » du grand Frank Miller, à la veille de la sortie d’une suite plutôt inattendue. Le jeune Miller révolutionnait ici le comic book américain, en allant se ressourcer du côté du manga et du chanbara japonais tout autant que du côté des maîtres français des années 70 (comme Mœbius, exemplairement). « Ronin » est une bombe de SF référentielle, truffée de bonnes idées qui annoncent les futurs bijoux de la bibliographie de Miller…

Pour le cinéma : à la faveur de la sortie d’un numéro de la Septième Obsession spécial « Japanimation », on revient sur le démentiel « Promare » (2019), signé par Hiroyuki Imaishi, fondateur et patron du studio Trigger. Complètement frappadingue et ne ressemblant (vraiment) à rien de connu, « Promare » est un monument du cinéma d’action version animée, aux frontières de l’abstraction totale et totalement jouissif, soyons clairs.

Le tout est comme d’habitude serti de bonne zique, comme il se doit : Earth, le légendaire combo mené par Dylan Carlson et Adrienne Davies, signe avec « Even Hell Has Its Heroes », BO d’un documentaire consacré au groupe, et le beau « This Bitter Glory » en est issu ; modeste hommage à feu Wayne Shorter, légende du jazz, dont on écoute « Dindi », extrait de l’album « Super Nova » de 1969 ; Fange, combo français entre sludge, métal indus, cold-wave et bien d’autres choses encore, passe à la vitesse supérieure avec l’excellent « Privation », et on en écoute pour la peine le terrible « A la racine », son morceau introductif ; enfin, les jammers brittaniques d’Ozric Tentacles nous régalent du très dub « Feng Shui », et c’est extrait de leur album « Jurassic Shift » de 1993…!!

« Au feu les faux-ailleurs, qu’ils finissent en charpie,
Seul et unique fossoyeur de mes utopies »

EPISODE 22 !!

Image Tarantino

Image Ronin

Image Promare

Et allez, à nouveau avec un peu de délai (pour cause de galère de trains), le chapitrage:

2023.03.29 - (2:28) Earth, (27:16) Quentin Tarantino, Cinéma Spéculations, Paul Schrader, Don Siegel, Martin Scorcese, Sam Peckinpah, Brian de Palma, Steve McQueen, Clint Eastwood, Tobe Hooper, Sylvester Stallone, (1:20:13) Wayne Shorter, (1:34:23) Frank Miller, Ronin, (2:21:16) Fange, (2:31:33) Hiroyuki Imaishi, Promare, (2:55:39) Ozric Tentacles

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Merci !! :slight_smile:

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Je t’en prie. Et, comme toujours, merci pour la mention dans l’épisode. Pour te répondre, oui, je suis un familier avec Ozric Tentacles, mais pas tant que ça par lien avec le prog. Pour raconter un peu ma vie, dans les années 90, je trainais un peu dans le milieu des free parties. Et, entre deux références à Hakim Bey et John C. Lilly, ce n’était pas rare de retrouver cités Ozric Tentacles comme des prédécesseurs à ce mode de vie. Dans le fond, il n’y a pas de grosse différences entre cette scène électro des années 90 et les free festivals que tu évoquais dans ta chronique. En gros, cette scène peut se définir comme les restes des hippies 60’s, de retour après leurs vacances à Goa.

Après, musicalement, je dirais que Ozric se place dans la lignée du space rock à la Hawkwind et Gong. Il y aurait des gens pour déclarer que le space rock relève plus du rock psyché que du prog mais, franchement, ces genres sont tellement entremêlés que ce genre de distinction semble vraiment artificiel.

Oui, voilà, c’est ce que j’en ai lu. Intéressant d’ailleurs, parce que autant les années 60 (et 70 dans une moindre mesure) et aussi les années 90 sont marquées par ce type de phénomène, mais on y pense pas tellement pour les années 80, riches aussi en développement de pratiques alternatives/« underground », mais moins axé sur ce type d’expériences-là, il me semble plutôt sur des expériences collectives « de niches » (je ne sais pas si je suis clair)…

Complètement d’accord avec ça, perso je me mélange régulièrement les pinceaux dans ce type de distinctions.

François Cau et Lelo Jimmy Batista reviennent également sur Cinéma Spéculations et le cas Tarantino dans Dis-cor-dia | Viteuf : Cinéma Spéculations de Quentin Tarantino.

Je n’ai pas lu le livre et ne compte pas le faire (la personnalité de Tarantino et son côté pseudo-gardien du temple du « cool » me fatiguent), mais j’ai plus ou moins le même ressenti qu’eux sur la filmographie de Tarantino, y compris sur Jacky Brown et peut-être Once upon a time in Hollywood qui me semble être suffisamment riche thématiquement pour supporter le passage du temps et plusieurs visions. Ce qui est amusant en soi parce que je suis plus jeune que les deux compères et n’ai pas eu le même rapport au cinéaste, même si la vision de Kill Bill à l’adolescence a eu un impact similaire à mon niveau que ce qu’a pu être la découverte de Reservoir dogs ou Pulp fiction dans leur cas. Faudrait que je revoie ce diptyque, mais c’est peut-être l’un des rares que je pourrais revoir sans me lasser.

J’étais tombé sur certains des articles de Tarantino rédigés pour le site du New Beverly Cinema et j’avais tiqué sur certains travers dans ses analyses. Je crois qu’il bachait Les proies de Don Siegel sur sa photographie notamment si je ne me trompe pas, ce qui m’avait laissé dubitatif; l’article n’est plus dispo, j’imagine que Tarantino a fait le ménage sur le site parce que Siegel fait partie des cinéastes abordés dans son nouveau bouquin. Il en touche un mot sur Les proies?

Non, pas du tout, si ce n’est en passant (et il a plutôt l’air de tenir le film en haute estime, à ce que j’en comprends en tout cas). Pour le partenariat Clint Eastwood/Don Siegel, il aborde « Dirty Harry » et aussi (plus étonnant) « L’évadé d’Alcatraz », un film qui me tient spécialement à coeur depuis tout gamin.
Il y a deux points étonnants dans les avis, parfois lapidaires, émis par Tarantino sur les films de ses confrères : déjà, on y trouve (comme je le dis je crois dans ma chronique) finalement assez peu de considérations sur la pure mise en scène. Si j’étais méchant, je dirais que ça n’est guère étonnant : même en temps que cinéaste, je n’ai pas l’impression que c’est ce qui l’intéresse le plus quand il réalise un film (et sans surprise, c’est en tant que scénariste qu’il a été « oscarisé », pas pour sa mise en scène) ; en effet, il ne me semble pas un grand cinéaste sur ce plan, perso.
D’autre part, et ça ça me le rend plutôt sympathique, il a parfois des avis iconoclastes, y compris concernant des cinéastes qui « ont la carte ou pas ». Il déteste (ce qui m’étonne beaucoup, moi qui adore ce film) « Le point de non-retour » de Boorman, alors qu’il aurait tout pour lui plaire, et reconnaît, même si ça se dit pas trop quand on est « cool », que « Les Dents de la Mer » est un des films les mieux réalisés de l’histoire du cinéma ; ça c’est intéressant, parce que ça laisse transparaître une certaine sincérité.

Moi aussi j’ai un rapport assez spécial à sa filmo ; « Once Upon A Time In Hollywood » par exemple m’avait déçu en salle, alors que j’étais très emballé a priori… mais j’ai pas pu m’empêcher de le revoir deux fois depuis. :slight_smile: Je pense que je me retrouverai pas mal dans les propos de nos deux compères à la faveur de cet épisode de « Dis-Cor-Dia »…

Concernant « Kill Bill », diptyque que je me suis refait y’a deux trois ans, je dois dire que je l’ai revu avec grand plaisir (j’avais adoré à l’époque de la sortie, mais vraiment quoi)… mais j’ai été surpris par le relatif manque de nerf et de patate de la réalisation, étonnamment (les limites de Tarantino en tant que cinéaste, encore et toujours).

Ça et les antisémites, il y a rien de plus que je déteste au monde

Ha ha ! La « doxa cool » tu veux dire ? ou les gens qui n’aiment pas « Les Dents de la Mer » ?

En faisant preuve de patience et en faisant un gros travail sur moi je pense que je peux tolérer les gens qui n’aiment pas Les dents de la mer.

Mais la posture cool qui consiste à chier sur ce film ou l’oeuvre de Spielberg, comme dire…je suis pas pour la peine de mort MAIS…

En cherchant, j’ai retrouvé ici ce qu’il en disait :

La critique ne porte pas sur la photographie comme je le pensais, mais plus sur les choix de mise en scène de Siegel, de là à parler de « miscast », c’est un peu gonflé…

J’écouterai ça; à défaut de lire le livre, ça m’intéresse néanmoins d’avoir plusieurs sons de cloche sur son contenu.

C’est le genre de sentence définitive qui m’inspire de la méfiance de mon côté, emprunte d’un certain américano-centrisme (il s’intéresse à bien d’autres cinématographies que le cinéma américain, but still…) et un peu vide de sens, enfin j’imagine qu’il doit détailler ça dans le bouquin. C’est le propre de Tarantino, ce n’est pas suprenant mais ça fait partie de ce qui me crispe chez le bonhomme. Mais bon, conceptuellement, à l’échelle d’un art comme le cinéma qui a plus d’un siècle d’existence et dont la forme propre invite à la revisite, à la (re)découverte et à l’analyse sous d’autres angles à l’aune du temps qui passe, ce type d’assertion m’apparait au mieux vaseux.

Je n’ai pas d’intérêt ni d’inimitié particulière pour le travail de Spielberg mais à une époque où on (re)découvre des oeuvres d’horizons divers, qu’on ait eu connaissance récemment par ex - tout du moins pour le public - des six films en tant que réalisatrice de Tanaka Kinuyo ces dernières années dont des films marquants comme La nuit des femmes ou Maternité éternelle invite à la mesure.

Je pense que j’y trouverai du plaisir en le revoyant, mais c’est clair qu’ayant plongé entretemps à la source même des genres où Tarantino a puisé son inspiration, ça risque de mettre en exergue les limites de sa mise en scène.

Pas encore revu Once upon a time in Hollywood mais j’avais ressenti un truc en salles que ne m’avait pas procuré les précédents.

Pendant l’épisode de Dis-cor-dia, il y a un moment où ils touchent du doigt me semble-t-il ce qui fait la limite de son cinéma et pourquoi une partie de ses films résistent difficilement au passage du temps. Je formule comme je l’ai compris, mais c’est quelqu’un qui n’a a priori pas vécu directement pendant son adolescence les remous qui ont émaillé la société américaine et dont la représentation de la violence à l’écran semble relever d’un certain fantasme qu’il s’en fait, abreuvé en partie par la culture cinéma qu’il s’est forgé. Je schématise grossièrement et ça mérite un approfondissement, mais ça me semble pertinent comme angle d’analyse parmi d’autres pour aborder sa filmo comme un ensemble.