Ah, Ruins, je connais un peu. J’étais tombé sur un album y’a quelques années (probablement parce que c’était édité chez Tzadik, le label de John Zorn) et j’avais kiffé ce que j’avais entendu, ouais.
EPISODE 11 : Le Plasma vert de Médée
Chouette alors : les abominables fêtes de fin d’année sont là… et avec elles la fameuse trêve des confiseurs ; ce soir c’est donc la dernière émission de l’année 2023 pour « Tumatxa! », mais on se calme et on boit de l’eau : on se retrouve bien sûr dans une petite quinzaine pour la suite de nos aventures radiophoniques.
Cinéma (téléfilm plutôt ce soir, pour être précis), littérature, BD, le tout en musique : tel est le programme fort classique et aussi attendue qu’une dinde à Noël qui nous occupe cette semaine !!
Pour le cinéma, à la faveur de la sortie d’un gargantuesque coffret (chez Potemkine) comprenant sa filmographie quasi exhaustive, revenons donc sur le corpus de ce joyeux drille de Lars Von Trier, avec le méconnu « Medea » (1988), qu’il réalisa pour le compte de la télévision danoise. Relecture plutôt fidèle de la fameuse tragédie infanticide d’Euridipe, déjà adaptée au cinéma par Pasolini avant lui, ce « Medea » témoigne de la teneur du travail du Von Trier de l’époque, en plein « trip Tarkovski » et expérimentant furieusement sur le plan formel. Il accouche au final d’une drôle de figure d’ange exterminateur au féminin, monstrueuse et pourtant poignante au possible.
Pour la littérature, c’est un vrai bonheur d’aborder pour la première fois le travail très impressionnant de Céline Minard, en l’occurrence son dernier-né « Plasmas » (tout récemment paru en poche). Drôle d’objet littéraire, entre faux recueil de nouvelles et roman de SF fragmentaire et elliptique, « Plasmas » ne ressemble finalement à pas grand chose de connu… mais fait la démonstration d’une maîtrise stylistique (quel boulot de ce point de vue !!) et d’une profondeur thématique peu commune. Avec en bonus quelques idées de SF pas piquées des hannetons comme on disait dans le temps.
Pour la BD, le stakhanoviste Jeff Lemire est à nouveau mis à l’honneur au sommaire de cette émission, associé à l’excellent Doug Mahnke aux dessins pour le « Swamp Thing - Green Hell » qui nous occupe ce soir. Sorti sur le Black Label de DC Comics (Urban pour la VF), ce récit hors-continuité met en scène un futur post-apocalyptique où le seul espoir de l’humanité réside dans le retour d’Alec Holland, alias la Créature des Marais (en bonne VF), associé comme souvent à un certain magicien punk de Liverpool, mais chut, je n’ai rien spoilé. Bien gorasse comme il faut, et bien usiné par le savoir-faire de Lemire, « Swamp Thing - Green Hell » évoquera des souvenirs émus à ceux qui ne sont jamais remis de la lecture du « Swamp Thing » d’Alan Moore, dont l’auteur de ces lignes, encore tout tremblant d’émotion.
Le tout est évidemment mis en musique, mais peu en rapport avec le proverbial esprit de Noël pour être honnête : les bordelais de Mars Red Sky reviennent avec « Dawn Of The Dusk », dont est issu le phénoménal « The Final Round » ; la folkeuse irlandaise Lisa O’Neill déchire les coeurs et les âmes avec le sublime « Old Note », extrait de son dernier album en date « All Of This Is Chance » ; pour célébrer les 30 ans de leur chef-d’oeuvre « Bloody Kisses », écoutons donc encore une fois le diptyque « Summer Breeze/Set Me On Fire » de Type O Negative ; enfin, concluons l’émission et l’année en beauté avec le beau « Microcosm », entre drone/ambient et slowcore, de Ghost Marrow, et c’est sur l’album « Earth + Death »…!!
« Feathered friend, dig up and resurrect me
I long to live among the song of birdies
A lawless league of lonesome, lonesome beauty
Skies and skies and skies above duty »
Et voilà pour le chapitrage:
2023.12.20 - (2:26) Mars Red Sky, (21:19) Lars Von Trier, Medea, (1:12:22) Lisa O’Neill, (1:21:12) Céline Minard, Plasmas, (2:01:03) Type O Negative, (2:14:40) Jeff Lemire, Doug Mahnke, Swamp Thing - Green Hell, (2:42:01) Ghost Marrow
Bonnes fêtes
Cool, merci !! Bonnes fêtes à toi, Manu !
(et bon anniversaire, aussi, avec un brin de retard )
Merci. Bonnes vacances
Hier soir, j’ai pris une bonne grosse claquasse en lisant la nouvelle « Le jardin malade » de Michel de Ghelderode.
Je suis sûr que tu adorerais (d’où mon message).
Elle se trouve dans son recueil « Sortilèges » (que je n’ai pas fini) sorti dans l’excellente collection « L’imaginaire » chez Gallimard.
Ah oui, c’est lui qui a écrit « Le Grand Macabre » aussi. Adapté en opéra par Gyorgy Ligeti
Wow, je connais pas du tout… c’est dûment noté !!
Je fréquentais aussi le même vidéo-club que Jean Rollin, dans le temps. On a causé quelques fois. Il parlait avec passion de l’œuvre de Michel de Ghelderode. Une de ses influences majeures, il semblerait
Je n’en avais tout simplement jamais entendu parler, je crois bien…
Tu papotais avec Jean Rollin ? La classe !!!
Jean Rollin… mais c’est mythique.
Oui, c’était même mon voisin, en fait. Il habitait à Ménilmontant. C’est à coté de chez moi. On se croisait régulièrement dans la rue. C’était le gars sympa. J’étais un peu fan de son cinéma avant de le croiser (La Rose de Fer, en particulier, j’aime beaucoup ce film). Du coup, c’était chouette d’en causer avec lui.
Content de voir que tu chronique Les Naufragés du Wager. Je tourne autour depuis sa sortie…
Les avis m’ont paru trop dithyrambiques pour être honnêtes. Un vieux réflexe que je n’arrive pas à contrôler…
EPISODE 12 : Le naufrage de Tomie dans le rêve malade
Bonne année et bla bla bla… ça c’est fait. Plus important : c’est le retour de « Tumatxa! », veinards que vous êtes. Emission copieuse cette semaine…
Cinéma (double dose), BD (manga), littérature (« non fiction », comme disent les anglo-saxons) et musique : tel est le programme ce soir !!
Pour le cinéma, penchons-nous sur le corpus déjà fort intéressant du nouveau venu norvégien Kristoffer Borgli, qui signe ces derniers mois pas moins de deux films, aussi passionnants l’un que l’autre, et en forte résonance thématique : « Sick Of Myself » et « Dream Scenario ». Dans le premier, une jeune femme frappée du syndrome de Münchhausen fait n’importe quoi avec des médocs russes glanés sur le web pour attirer sur elle l’attention qui lui fait cruellement défaut : c’est drôle et poignant à la fois. Dans le second, l’inénarrable Nicolas Cage (absolument fabuleux dans le rôle) joue un prof d’université un peu médiocre qui se retrouve dans les rêves de l’humanité entière ou presque, à sa grande surprise dans un premier temps avant que la consternation ne l’emporte… Deux excellents comédies noires qui font attendre avec impatience la suite du travail de Borgli, clairement.
Pour la BD, on évoque un monument du manga avec l’intégrale (ou presque) du « Tomie » de l’immense Junji Ito, incontestablement l’une des plus grandes voix du récit horrifique des 30 ou 40 dernières. Entre fantôme, mort-vivante, yōkai ou succube, Tomie est une drôle de bestiole, qui déchaîne les passions les plus meurtrières autour d’elle… quitte à en faire les frais. Ce qui n’est pas si grave puisqu’elle revient toujours, y compris des sévices les plus carabinés. Dérangeante, drôle à sa façon singulière et poignante de façon plus secrète encore, « Tomie » est une série majeure du corpus du génie japonais.
Pour la littérature, nous abordons le dernier-né de la bibliographie de David Grann, l’auteur de « non fiction » préféré d’Hollywod (adapté entre autres par Scorsese, Gray et Lowery…), avec « Les naufragés du Wager », hallucinante odyssée maritime se déroulant au milieu du 18ème siècle et ponctuée, entre autres mésaventures à peine croyables, par une mutinerie… mais est-ce bien une mutinerie ? D’une intensité invraisemblable, étayé par une documentation titanesque, le livre de Grann se dévore en moins de temps qu’il n’en fait pour choper le scorbut sur une embarcation jetée au milieu des océans…
Le tout est évidemment mis en musique, et de fort belle manière : à la faveur de l’annonce d’un coffret récapitulatir de l’ère Tony Martin du groupe, on s’écoute du Black Sabbath, avec le sublime « When Death Calls », sur l’album « Headless Cross » (spéciale dédicace à Shiran Kaidine !!) ; le trio norvégien Melt Motif signe l’excellent « Broken Floor », dans un registre électro-pop abrasive, et c’est sur l’ealbum « Particles. Death Objective » ; le one-woman band finlandais Shedfromthebody nous régale de « Hours », sur l’album « To Hold The Ripened Sun », entre sludge plombé et envolées heavenly voices ; enfin, Aidan Baker (Nadja, entre autres) est déjà de retour dans l’émission avec les 5 (!!) albums de la série Trio Not Trio, dont est extrait le magnifique et épique « Seithfed »…!!!
« He saw the world, dim with the glow of the vertical sun
His skin crept cold knowing that this was the hours of dying
Misguided mortals, you’ll burn with me
Spirit of man, cannot be freed »
Eh bien, écoute, c’est vraiment hyper-bien… et pourtant a priori je partageais tes réserves. Pas tellement sur l’unanimisme de sa réception, mais plutôt sur l’exercice de la « non fiction romanesque » en lui-même. Des réserves trop théoriques et infondées, au bout du compte. Le livre est vraiment très spectaculaire, incroyablement riche et accrocheur.
Et voilà pour le chapitrage:
2024.01.10 - (2:04) Black Sabbath, (32:35) Kristoffer Borgli, Sick Of Myself, (1:03:57) Dream Scenario, (1:36:51) Melt Motif, (1:44:13) Junji Ito, Tomie, (2:30:44) Shedfromthebody, (2:42:38) David Grann, Les Naufragés du Wager, (3:18:59) Aidan Baker
Merci !!!
J’ai récupéré Life house cette semaine, un roman graphique basé sur le script de l’opéra rock abandonné écrit par Pete Townshend en 1971. Adaptation en comic book par James Harvey, David Hine, Max Prentis et Mick Gray.
L’histoire prend place dans un futur dystopique où toute musique est interdite. Dans ce contexte, un petit groupe de marginaux essaie de mettre sur pied un concert underground dans le but de contrer la domination d’un tyran et de libérer l’Angleterre.
Je suis pas loin d’être inculte en musique mais j’ai pris le bouquin parce que c’est co-écrit et dialogué par David Hine en plus d’être un des albums les plus imaginatifs visuellement qui me soit tombé sous la main depuis longtemps. Les premières pages ne donnent pas forcément toute l’ampleur de ce qu’on peut trouver à l’intérieur mais un rapide feuilletage laisse augurer d’un album expérimental et passionnant à parcourir.
J’imagine que c’est pile le genre de chose à la confluence de tes centres d’intérêt.
Ah super, merci beaucoup !! Oui, ça m’intéresse, bien sûr. Je crois bien avoir avoir entendu parler de ce projet avorté des Who, qui fait très Pink Floyd/Roger Waters dans l’esprit…
J’imagine que ça n’existe qu’en VO…? Les illustrations ont l’air superbe en tout cas.
Tiens, j’en profite pour faire un peu de teasing pour l’émission de la semaine, plus précisément pour la chronique littérature…
Une fois n’est pas coutume (même si c’est déjà arrivé), nous aborderons un roman anglo-saxon en VO. Indice : l’auteur du roman en question est bien connu des usagers du forum, surtout de la section comics.
Et on peut dire aussi qu’il a un accent écossais à couper au couteau.