Comédie fantastique
Long métrage américain
Réalisé par Roger Corman
Scénarisé par Richard Matheson d’après le poème d’Edgar Allan Poe
Avec Vincent Price, Peter Lorre, Boris Karloff, Hazel Court, Jack Nicholson…
Titre original : The Raven
Année de production : 1963
Once upon a midnight dreary, while I pondered, weak and weary,
Over many a quaint and curious volume of forgotten lore—
While I nodded, nearly napping, suddenly there came a tapping,
As of some one gently rapping, rapping at my chamber door.
Tis some visiter, I muttered, tapping at my chamber door—
Only this and nothing more.
La notable deuxième partie de la filmographie de Roger Corman en tant que réalisateur, celle qui couvre les années 60, est en grande partie marquée par son cycle Edgar Allan Poe, période qui lui a permis de signer quelques uns de ses meilleurs longs métrages (mon préféré étant Le Masque de la Mort Rouge, notamment grâce au superbe travail d’un certain Nicolas Roeg au poste de directeur de la photographie). Les adaptations de Poe par Corman, c’est huit films en cinq ans (en comptant La Malédiction d’Arkham qui fait se rencontrer les écrits de Poe et Lovecraft), Le Corbeau sorti en 1963 étant le cinquième. Et ce qui le distingue des autres est que Roger Corman et son scénariste Richard Matheson ont eu la drôle d’idée d’en faire une comédie fantastique !
Après quatre films, Corman et Matheson ressentaient déjà le besoin de se renouveler et ils avaient même traité le segment central de l’anthologie L’Empire de la Terreur, une adaptation du Chat Noir, sur un ton plus léger. Pour Matheson, développer un scénario autour du Corbeau relevait de la plaisanterie car le poème n’avait pas assez de « substance » pour construire une histoire avec ses éléments. Donc si c’était une plaisanterie, aller à fond dans la comédie mâtinée de fantastique était en quelque sorte la direction naturelle à prendre…
Au XVème siècle, en Angleterre, le docteur Erasmus Craven (Vincent Price, qui fut de presque tous les Poe cormaniens) vit dans son château avec sa fille Estelle et pleure la disparition de sa bien-aimée Lenore. Un soir, il reçoit la visite d’un corbeau doué de parole. Il découvre qu’il s’agit en fait du docteur Bedlo (Peter Lorre dans un de ses derniers rôles), un magicien minable transformé en oiseau par le sorcier Scarabus (Boris Karloff). Redevenu humain, Bedlo apprend à Craven qu’il a vu Lenore bien vivante dans la demeure de Scarabus…
Si faire du Corbeau une comédie pouvait paraître incongru, Corman et Matheson s’en sont bien sorti tant le long métrage se révèle être assez savoureux dans son genre. Et c’est en grande partie grâce à l’abattage du trio vedette, soutenu entre autres par Hazel Court (Frankenstein s’est échappé) en vénale Lenore et un jeune Jack Nicholson (révélé par Corman cinq ans plus tôt dans The Cry Baby Killer) dans le rôle du fiston de Bedlo. Price, Lorre et Karloff s’amusent comme des petits fous (avec des gags et des répliques quasi-cartoonesques pour les deux premiers), la direction artistique de Daniel Haller est toujours aussi soignée et si certains passages sont un brin faiblards (comme le duel de magie final un peu trop statique…mais la santé de Karloff était déclinante et il ne pouvait en faire plus), l’ensemble ne manque pas de fantaisie…pour ceux qui acceptent bien entendu le parti pris des auteurs…
Jamais le dernier pour faire des économies et rentabiliser des décors, Roger Corman a fait de même ici lorsqu’il s’est rendu compte qu’il avait terminé de tourner Le Corbeau plus tôt que prévu. Il a donc profité de cette avance pour débuter un autre tournage, celui de The Terror, qui deviendra un véritable puzzle à la production très, très chaotique.
