REALISATEUR
Mark Robson
SCENARISTE
Donald Henderson Clarke
DISTRIBUTION
Richard Dix, Russell Wade, Edith Barrett, Ben Bard…
INFOS
Long métrage américain
Genre : drame/thriller
Titre original : The Ghost Ship
Année de production : 1943
En 1942, le succès de La Féline de Jacques Tourneur a sauvé la RKO du désastre financier. Les dirigeants du studio ont bien entendu souhaité que Val Lewton enchaîne sur une suite, mais l’homme, qui n’était pas intéressé dans l’immédiat, a réussi à repousser ce projet (pour finalement le produire en 1944 sous le titre La Malédiction des Hommes-Chats, mais en allant dans une direction totalement différente). Après La Féline, la branche « cinéma fantastique » de la RKO n’a pas chômé. Jacques Tourneur a travaillé d’affilée sur Vaudou et L’Homme Léopard et Mark Robson (le monteur de la « trilogie » de Tourneur) a fait ses débuts de réalisateur avec l’intrigant La Septième Victime.
Vu les bons résultats, Charles Koerner, le nouveau patron de la RKO, ne voulait pas que Val Lewton se « tourne les pouces » en quelque sorte en attendant que certains acteurs se libèrent pour La Malédiction des Hommes-Chats. La Septième Victime à peine terminé, il demanda à Lewton de produire un film d’horreur maritime en utilisant le bateau construit pour le film Pacific Liner (qui dit budget réduit, dit recyclage de décor existant) et le titre The Ghost Ship (Le Vaisseau Fantôme en V.F.). Mais comme Lewton ne faisait pas comme tout le monde, il n’y a pas de fantôme dans Le Vaisseau Fantôme…pas de façon littérale, en tout cas…
À nouveau réalisé par Mark Robson, Le Vaisseau Fantôme suit les pas de Tom Merriam, incarné par Russell Wade (Le Récupérateur des Cadavres), un officier fraîchement émoulu de l’école navale qui embarque pour son premier poste sur le cargo Altaïr. Le capitaine Will Stone (l’expérimenté Richard Dix, alors dans les dernières années de sa carrière) l’accueille cordialement…mais durant la traversée, Merriam va découvrir son vrai visage : celui d’un tyran qui s’arroge le droit de vie et de mort sur son équipage…
Le Vaisseau Fantôme est une autre bonne démonstration de l’efficacité de la méthode de Val Lewton en matière d’ « horreur psychologique ». La tension monte par petites touches dans la première moitié, des actions qui développent le caractère psychotique du capitaine et qui nourrissent le suspense du bras-de-fer qui se déroule entre le vieux loup de mer (prestation solide de Richard Dix, et fiévreuse dans le dernier acte où Stone finit par perdre complètement le contrôle de ses actes) et son jeune officier qui tente de prouver ses dires…mais sans preuves, Merriam perd aussi la confiance de l’équipage…
Comme à chaque fois, le résultat final doit beaucoup au remarquable travail sur les ombres et les lumières qui donne son cachet à ce décor quasi-unique. La scène où Merriam se barricade dans sa cabine pour tenter d’échapper à la vindicte de Stone est très intéressante dans sa composition. La façon dont elle est construite lui donne un parfum d’histoire de fantôme…avant un intense affrontement final qui tire bien parti du lieu de l’action par le montage, les éclairages et les angles de caméra utilisés…
Le film s’ouvre et se referme sur un procédé de narration qui renforce l’atmosphère particulière de l’histoire…la voix-off nous fait entendre les pensées d’un marin muet et illettré, une sentinelle silencieuse qui en sait long sur ce qui se passe sur ce navire…un beau personnage, plus important qu’il n’y paraît de premier abord alors que son interprète (cette sacrée trogne de Skelton Knaggs) n’est, comme souvent, même pas crédité au générique…