PROJETS AVORTÉS : les albums franco-belges que vous ne verrez jamais

En grenouillant sur le forum Thorgal (entre deux mails professionnels à écrire qui prennent du temps et pompent de l’énergie), je découvre plein de projets liés au personnage de Van Hamme et Rosinski et témoignant de l’énergie que Le Lombard consacre au développement de la franchise depuis de longues années.
Et je me dis que c’est l’occasion d’ouvrir un sujet sur les fameux « projets avortés », mais cette fois pour l’univers de la BD franco-belge.

INDEX :
Spirou : Zorglub à Cuba (Tome / Janry)
Thorgal par Patrick Pion
Thorgal / Jolan par Philippe Xavier
XIII Mystery par Laurent Astier

Jim

Série Jolan, par Philippe Xavier

Vers 2010, Philippe Xavier, connu aujourd’hui pour la série Tango écrite par Matz, est contacté par Le Lombard :

THORGAL//JOLAN : en 2010-2011 ( je crois ) le Lombard allait développer les mondes de THORGAL… mon nom était associé au tout début du projet … j’avais une petite idée sur Jolan jeune adulte… ça a pris trop de temps et j ai donc embrayé sur CONQUISTADOR.

r0fc

Jim

Thorgal par Patrick Pion :

2009, planche d’essai (refusée) pour Thorgal aux éditions Le Lombard, c’était ma bande dessinée préférée depuis tout gosse…

Sur le blogspot de Patrick Pion, on peut voir des modifications apportées à la planche.

Avant :

Après :

mqz1

Jim

On débute cette semaine avec un projet avorté un peu spécial puisqu’on se désintéresse, une fois n’est pas coutume, des comics américains pour se consacrer à la bande-dessinée Franco-Belge avec les biens aimés Spirou & Fantasio.

En 1998, le scénariste Tome et le dessinateur Janry, déjà auteurs de 12 albums de Spirou où ils remettaient en question tantôt l’identité (La Jeunesse de Spirou, Le Rayon Noir), la légitimité (La vallée des Bannis, Le réveil du Z) et la sexualité (Luna Fatale) du groom aventurier, décident de secouer un grand coup le quotidien de la série avec « Machine qui Rêve » (Spirou & Fantasio, T.46). Dans un ton et un graphisme résolument plus sérieux, ce 13ème tome raconte l’échappée urbaine de Spirou poursuivi par une mystérieuse organisation pour finalement découvrir, dans un retournement digne des plus grands classiques de S-F, qu’il est un clone/robot de l’originale. Ce faisant, Spirou² incarne tout ce que le vrai Spirou ne pourra jamais être, libéré des obsessions de ses auteurs sur la légitimité, l’identité et la sexualité (Spirou² quitte le pays aux cotés de Seccotine).

Mais la greffe ne prend pas. Les inconditionnels de Spirou boudent cette prise de risque qui, plutôt que d’être la révolution espérée par Tome et Janry, marque la conclusion exceptionnelle à un parcours non moins exceptionnel. Ce qui frappe les lecteurs avec Machine qui Rêve, c’est le grand écart de style qui tranche avec les précédentes productions comme l’explique Philippe Tome:

Démotivés suite à la mort du responsable (et ami) Philipe Vandooren, Tome et Janry préfèrent se consacrer à la série Le Petit Spirou et laisser une nouvelle équipe, Morvan et Munuera, reprendre les aventures de Spirou (avec le retour qu’on leur connait maintenant). Cependant, l’histoire de Tome et Janry ne s’arrête pas là. Entre la publication de « Machine qui Rêve » et les premiers échos, les deux auteurs avaient commencé à travailler sur un quatorzième album intitulé Zorglub à Cuba (ou Spirou à Cuba)

Comme le prouvent les huit premières pages (ci-dessous) réalisées à destination d’une pré-publication dans Le Journal de Spirou, l’aspect graphique de « Machine qui Rêve » est conservé mais les deux auteurs avaient abandonné le trop grand sérieux reproché à bien avant que la polémique ne démarre. « Zorglub à Cuba » aurait dû raconter comment Zorglub prenait possession de Cuba et des îles environnantes pour en faire une hyper-prison où les détenus s’affrontaient dans des jeux dangereux.

Il faudra attendre 2008 pour que les lecteurs puissent découvrir deux planches de cet album avorté lors d’une exposition Bruxelloise, mais c’est finalement en 2011 dans le numéro spécial Come-Back (Le Journal de Spirou n°3839, novembre) que Dupuis publie l’intégrale des planches (malheureusement indisponible en français sur le net). Encore aujourd’hui, plusieurs rumeurs parlent d’une reprise de l’album et d’une future publication dans la collection Une Aventure de Spirou et Fantasio de…, ce qui n’a malheureusement qu’été évoqué par le dessinateur Janry en 2009:

Découvrez les premières planches de Zorglub à Cuba :

Cool cet article ! Je pense que les planches ont la possibilité d’être de nouveau publiées dans la dernière intégrale Dupuis de Tome et Janry^^

Le Spirouphile qui est en moi (et qui n’a jamais digéré les piètres albums faisant suite au run de Tome & Janry) pleure de ne pas avoir eu la chance de lire cette histoire dans son intégralité. Quelqu’un sait comment traverser vers un univers parallèle ? Je lui ramène un exemplaire pour la peine!

Tu n’apprécies pas non plus ce qu’ont fait Yoann et Velhmann ?

[size=85]Et même les tomes de « Le Spirou de… » ? Parce que le dernier de Yann et Schwartz (le deuxième pour l’équipe, et le troisième pour Yann), « La Femme Léopard », est très chouette dans son ambiance « pulp » décomplexé. Il offre une version « après-guerre » assez solide dans la continuité de Emile Bravo et de la paire Lewis Trondheim/Fabrice Parme, et le soucis du détail de Schwartz (à chaque case sa référence) rend la lecture très fourni. On est loin de la tradition Franquin (et son enchainement hallucinant de péripéties), mais c’est très agréable.[/size]

Je suis grave fan des Yoann et Vehlman, pour ma part. C’est fun, mauvais esprit et hyper bien dialogué.

Les 3 premières planches sont disponibles en français sur la visionneuse d’Izneo : player.izneo.com/read/0325138390237.html

Tori.

Merci Tori, l’interview est de qualité également^^. Je suis pour, Geoffrey, l’achat de l’album de l’univers parallèle, je t’accompagne même si tu veux bien! ^^
Moi j’apprécie ceux de Yoann et Vehlmann surtt le dernier, ils sont enfin arrivés à leur rythme de croisière…

personnellement je déteste les derniers albums de la paire yoahnn et vehlmann et je ne comprends pas toujours pas aujourd’hui cette hype autour de leur taff que je trouve assez mauvais (surtout celle sur l’image de marque de spirou même si ça part d’une bonne idée ça tourne court)

pourquoi, tu préfères les Morvan/Munuera ?

On en tient un, les gars !

oui et alors z’allez pas me jetter des pierre quand même

j’ai apprécié le run de morvan surtout l’homme qui ne voulait pas mourir pour plusieurs raison même si je ne suis à la base pas un fan du travail de morvan en général pour avouer je ne le connaissait pas, le seul truc ou j’ai vu son nom que j’ai lu auparavant c’était le premier cycle de HK quand à Munuera c’est pareil (j’ai lu bien plus tard leur Wolverine…ainsi que celui de Tsutomo Nihei).

La première raison c’est que je trouve le style de Munuera très frais et dynamique, un petit côté cartoon période Avery.
Quand au scénard il remercie deux périodes que j’aime beaucoup celle de Franquin mais aussi celle de Fournier (ma préféré surtout pour son dessin sur la 1er partie de son run, son style à ensuite évolué avec avec un spirou en patte d’ef’ SANS ËTRE MOCHE mais niveau scénard ça reste nikel du début à la fin, la scène de la Renaud 5 qui fait des beau virage dans l’ankou me fait toujours rire…mm bref), morvan, s’amuse à réintroduire certain personnage disparut comme ito kata et zantafio le mouton noir, ce qui est assez sympa.

Et ma lecture de ce run m’a été assez plaisante sans renversé des montagnes c’est vrai mais il y avait de quoi s’améliorer sur les prochains quand à l’épisode de transition entre les deux scénaristes c’est juste naze sauf les dessins mais surtout un gros gachis.

Non, la spécialité du Nikolavitch, c’est le gros chien !

Ohhhh. (Pose la pierre).

Et là, j’ai en tête l’image d’une pierre qui s’immobilise en l’air… ~___^

Tori.

Avatar, nous voilà !

C’est tentant, tout de même, faut bien l’avouer…

Moi, j’aime pas le travail de Morvan (alors que je le trouve passionnant en interview, c’est quelqu’un qui aime son métier et qui sait le faire partager). Mais je te conseillerais tout de même son 7 Yakuzas, qui est plutôt bien rythmé et bien caractérisé, ainsi que Le Cœur des Batailles, qui donne une dimension humaine à sa fascination de la guerre. Et j’ai récemment lu le premier tome de l’adaptation de Oms en série, d’après Stefan Wul, et c’est plutôt pas mal.

Ah ?
Moi, je le trouve cartoony aussi, mais plus tendance japonaise qu’américaine. C’est pas une critique, hein, mais je trouve Yoann plus cartoony au sens Avery du terme. Et y a une grosse influence Franquin chez Yoann, qui le place dans la droite ligne de la série, contrairement à Munuera.
J’aime les deux dans l’absolu, mais mon cœur va du côté de cette ligne franco-belge nerveuse, tout de même.

Oui, c’est un peu la moindre des choses quand tu reprends une série avec un tel passif.
Moi, je vais te dire, je trouve que le court run de Morvan a surtout été le prétexte à une écriture de fan qui fait plaisir au scénariste au détriment de ce qu’il peut apporter à l’univers. Paris Sous Seine, c’est l’exemple parfait, hélas : il a une menace formidable, et il introduit un nouvel adversaire. Et il n’en fait rien. Les flash-back posent plus de questions qu’ils n’apportent de réponse, les personnages ne sont pas creusés, et il a même l’audace de perdre deux pages à faire un gag sur Spip. Dans un récit en quarante-six pages, on n’a pas le temps de pareilles fantaisies, et quand on voit ce qui manque à cet album pour être satisfaisant, on se dit que c’est du gâchis. Spirou à Tokyo, c’est pareil, il se fait plaisir, au détriment de l’intrigue et des personnages, qui, fort heureusement, sont suffisamment conséquents en eux-mêmes pour pouvoir supporter cela.
J’ai donc trouvé le truc passablement creux sur l’ensemble des albums, et même si c’est très joli, ça ne m’emballe pas.
Le seul album qui me plaise réellement, c’est le dernier, Aux Sources du Z. Parce que l’hommage est super amusant (surtout à La Mauvaise Tête, mais pas que), et que c’est super audacieux de rebooter ainsi la série. D’autant que là, pour le coup, non seulement Morvan construit quelque chose et enrichit la série, mais en plus il la met en situation d’affronter les années et décennies à venir, mais il n’en profitera pas lui-même. C’est un formidable cadeau qu’il fait à ses successeurs.
Bref, tout pour me plaire : une action rapide, une inscription dans la continuité, un statu quo reconstruit, j’aime bien.

Moi, j’étais bien content quand il a passé la main.

Qu’est-ce que tu appelles « l’épisode de transition » ? Aux Sources du Z ?
J’ai adoré, moi.

Personnellement, j’adore.
Les dialogues dans le tandem de héros sont formidables, ça fuse, c’est drôle. Il y a un mauvais esprit toujours présent. Les personnages secondaires sont épatants. Les idées sont farfelues mais visuellement prenantes.
Et Spirou est en reconquête de son image, mais il n’y arrive pas : il est transformé en monstre, il est dépouillé de son droit à l’image, bref, s’il a été rajeuni pour être en prise avec son univers, il demeure décalé, impuissant. C’est le héros, mais il ne maîtrise rien. Je trouve ça astucieux.

Non, je trouve que c’est plutôt constructif. C’est à l’état de simple gag dans Alerte aux Zorkons, mais ça devient le sujet de Dans les griffes de la Vipère. Et ce thème de la confiscation des imaginaires, c’est assez formidable. En plus de lancer la série dans des directions inattendues, et de rompre également avec une certaine forme de manichéisme (qui est toujours plaisante, même en franco-belge, mais qui peut se montrer répétitive). Qui plus est, je sens la volonté de tracer des fils rouges sur ce run en développement, et j’aime bien l’idée.
Vraiment, je suis super fan !

Jim

Zantafio avait déjà été réintroduit par les auteurs précédant Morvan et Munuera dans Spirou à Moscou.

Donc, si une intégrale Morvan / Munuera voyait le jour, je pourrais passer mon chemin sans regret?

Avec un trait qui conviendrait bien aux productions Mickey Parade. C’est marrant d’ailleurs, parce que le passage Morvan/Munuera me fait justement penser à une adaptation aseptisée à destination d’une nouvelle série animée. Ça se lit vite, les caractères des personnages sont grossiers, avec un Spirou plus sage et héroïque tandis que Fantasio devient plus râleur et gaffeur (et qui est dans la droite lignée de ce qu’avait fait Fournier en « déséquilibrant » le couple à la mode Tintin/Haddock).

D’ailleurs, dans « La Vallée des Bannis » Tome & Janry questionnaient cette légitimité héroïque de Spirou en le confrontant à Fantasio, l’éternel acolyte (qui était pourtant tout aussi héroïque que son compère chez Franquin).

Je continue de penser que Munuera, aussi joli que ce soit à regarder, c’est une erreur de casting sur Spirou.

Oui, mais je me demande si ça ne nous parle pas plus à nous lecteurs de comics parce que la rétro-continuité/le krypto-révisionisme fait partie de notre langage. Dans l’absolu, je suis content que Yoann et Vehlman se soient contentés de passer outre (ce n’est que de bonne guerre, Morvan et Munera ramène directement Seccotine pour une case dans « Paris Sous Seine »), mais il y a moyen de faire un bon numéro cossover en ramenant le « jeune Spirou » et le « Clone Spirou ». Spirou War ? Spirou Vs. Spiroux ?

Ce faisant, la paire Yoann/Velhman hérite des questionnements incertains qu’avaient déjà Tome & Janry ou même Nick & Cauvin (voir les trois couvertures de leurs albums qui se répètent jusque dans la posture des deux héros) au sujet de la paternité de l’œuvre.