SANS RETOUR (Walter Hill)

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REALISATEUR

Walter Hill

SCENARISTES

Michael Kane, Walter Hill et David Giler

DISTRIBUTION

Powers Boothe, Keith Carradine, Fred Ward, Brion James, Peter Coyote…

INFOS

Long métrage américain/britannique/suisse
Genre : action/thriller
Titre original : Southern Comfort
Année de production : 1981

« Southern Comfort »…le confort du Sud (et aussi le nom d’une célèbre liqueur dont on dit qu’elle est « douce et fruitée en bouche »…là, je cite la publicité, je ne bois pas d’alcool). Titre particulièrement ironique…car les conditions dans lesquelles sont plongées les personnages du cinquième long métrage réalisé par Walter Hill (Les Guerriers de la Nuit) n’ont rien de confortables…

Pressés de terminer un exercice militaire dans les marécages de la Louisiane, neuf membres de la Garde Nationale décident d’emprunter des barques pour rejoindre le point de ralliement le plus vite possible et prendre un peu de bon temps. Alors que les militaires ont quitté le rivage, les propriétaires des embarcations se manifestent. Pour les provoquer, l’un des soldats tire une rafale de balles à blanc. Mais les cajuns prennent cette mauvaise blague très au sérieux.
Et eux, ils ont des vraies balles…

Sans Retour a souvent été décrit comme une métaphore sur le Vietnam…et c’est une lecture qui peut être appliquée à certains aspects de l’histoire. Mais selon les propres déclarations du réalisateur, ce n’est pas ce que Walter Hill cherchait à faire avec ce suspense à l’atmosphère oppressante. Et il est vrai que Sans Retour est plus que cela. Récit de survie qui se nourrit de la paranoïa et de l’incompréhension face à un véritable « choc des cultures », le film navigue souvent dans les eaux du thriller horrifique.

L’une des très bonnes idées de Walter Hill est de ne pas donner de visage(s) à la menace qu’affronte les gardes nationaux jusque dans les derniers instants. Les chasseurs cajuns sont maîtres de leur terrain, ce qui conduit progressivement les gardes nationaux à la désorganisation, la panique et la folie.

Il n’y a pas de « bons » et de « méchants » dans Sans Retour. Chaque camp se conduit de manière destructrice, autant les uns envers les autres qu’à l’intérieur du groupe, ce qui provoque une tension qui ne se relâche jamais. La faible cohésion entre les « soldats du dimanche » est vite plombée par la mort de leur sergent et il ne sera pas facile de faire entendre la voix de la raison dans cette « guerre civile » menée dans un territoire inhospitalier et née de l’ignorance et de l’arrogance.

La distribution est excellente. On retrouve dans les premiers rôles Keith Carradine (que Walter Hill avait déjà dirigé dans Le gang des frères James), le regretté Powers Boothe (qui tournera à nouveau pour Walter Hill dans Extrême Préjudice), le buriné Fred Ward (Remo sans armes et dangereux, Tremors…) et cette sacrée trogne de Brion James (Blade Runner) en braconnier cajun à l’accent prononcé retenu prisonnier par les gardes nationaux.
Bref, que du solide…

Parfaite utilisation des décors et des conditions naturelles, travail impeccable sur la photographie et le son, placement judicieux de la musique de Ry Cooder…autant d’éléments qui font de Sans Retour un suspense qui prend aux tripes, jusqu’aux derniers instants d’un final remarquablement orchestré, d’une incroyable intensité…

1 « J'aime »

J’adore ce film, probablement le meilleur que j’ai pu voir signé par Walter Hill.
J’ignorais que Hill réfutait la grille de lecture « allégorie du conflit vietnamien », mais il n’a pas tort, le film dépasse ça. Comme « Délivrance » ou « Massacre à la tronçonneuse », il est plus précisément un état des lieux d’une fracture irrémédiable entre deux Amériques irréconciliables.

J’avais oublié (ça fait bien huit ou dix ans que j’ai pas vu le film) que les « agresseurs » n’avaient pas de visage ; ça fait très Carpenter période « Assaut », ça, et ça contribue énormément à l’atmosphère du film…

Je suis bien d’accord, c’est très efficace comme approche. On ne les voit qu’à la toute fin, dans la scène du village (il y a notamment Sonny Landham, le Billy de Predator, qui n’avait pas encore rasé sa moustache d’acteur porno des seventies). Et quelle fin, avec un montage brillant sur le rythme de la chanson cajun…

Y’a un ralenti saccadé absolument terrible sur le final si je me rappelle bien ; je suis habituellement pas fan du procédé (terriblement eighties dans le rendu, à mon goût), mais là ça marche du tonnerre.

Ah c’est vrai qu’il y a ce bon vieux Billy…

On le sait depuis le troisième film, Doc !

Jim

Ahahahaha

Héhéhé…excellent ! :rofl:

Si j’en crois Wikipédia, il serait revenu sur cette réfutation et admettrait qu’il avait bien eu l’intention de faire un parallèle avec la guère du Vietnam lors d’une master-class à la Cinémathèque Française.

A priori c’est là :

Venant (enfin) de voir la film j’avoue que sa réfutation initiale m’étonne tant le film respire cette métaphore par tous les pores là où celle d’une fracture entre deux Amériques me semble trop limité parce que j’imagine mal qu’elles sont ces deux camps irréconciliables entres les teubés de la ville et les teubés des champs.

Pour ma part outre que dans le Bayou on vous entendra pas crier (on est clairement pas trop loin d’Alien aussi) il y a surtout une description de l’arrogance du colon qui va se prendre la charge de l’habitant en pleine poire.

Mais fondamentalement ce qu’il fait la force du film (et du cinéma de Hill à cet époque) c’est l’écriture de ses personnages et le talent pour capter l’essence d’un décor magnifique. Que ce soit la jungle urbaine ou celle du Bayou, Hill est le champion pour ce qui est de valoriser celle-ci et en faire un personnage à part entière.

Sinon en furetant sur le wiki anglais je suis tombé sur cette version :

Change of story under Iranian censorship

In the late 1980s Iranian state TV IRIB broadcast the film, under the name « Operation Lagoon » (Amaliyate Mordab). The film was shortened to 95 minutes, and the story was changed. In the Iranian version, a group of US Army soldiers who opposed the Vietnam War are sent on a mission among man-hunters, equipped only with blanks. The soldiers are killed by man-hunters one after another as planned by US authorities. At the end, when the remaining two soldiers believe the US Army truck is coming to save them, the picture fades and the sound of constant shooting is heard, indicating the US authorities killed all the soldiers. The film was a huge hit among the Iranian audience. The Iranian film critics believed that the IRIB censored version made more sense considering the American government’s alleged atrocities overseas.[16]