1941-2021 : BON ANNIVERSAIRE WONDER WOMAN !

Les multiples mésaventures de Steve Trevor, quatrième partie :

Le monde est enfin débarrassé de Steve Trevor, ce personnage qui s’accroche à son statut en dépit de tout.

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Mais pour Diana Prince, ce n’est ni aussi simple, ni aussi facile. Le monde moderne, qui n’a pas, pour reprendre un cliché, la simplicité de la société dans laquelle elle a fait ses premiers pas, devient de plus en plus difficile à supporter, d’autant que la présence de Steve avait tout pour la rassurer (elle ne sait pas ce qu’elle veut, cela dit : la version Steve Howard avait le don de la mettre sur les nerfs !!!).

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C’est sur ce postulat que Gerry Conway ouvre une nouvelle trilogie dans Wonder Woman #269, que l’éditorial présente comme une nouvelle ère pour le personnage (encore ?!?!) : l’expression « All-New » orne la couverture, et l’accroche « A New Beginning in the Wonder Woman Saga » accompagne les crédits de première page. Len Wein fait rouler les tambours et sonner les trompettes.

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Avant d’aller plus loin, signalons que cet épisode, dessiné par l’inamovible José Delbo, bénéficie de l’encrage de Wally Wood, qui fignole huit des dix-sept pages du récit, le reste étant confié au très compétent Bob Smith. C’est l’une des deux occasions (à ma connaissance) pour le légendaire illustrateur d’œuvrer sur la série consacrée à la Princesse Diana (l’autre), après avoir travaillé avec Mike Sekowsky sur Wonder Woman #195. S’il s’agit d’un travail de commande, qui plus est situé à la fin de sa carrière, un an avant son décès, et si l’on sent l’auteur moins inspiré que d’ordinaire, Wood livre tout de même un trait gracieux, doux, mais dynamique. Il est intéressant de comparer le début de l’épisode avec la seconde moitié, où Smith donne à Diana des traits plus anguleux et secs et un visage plus long. Le passage d’un style à l’autre se fait sans douleur et l’épisode est assez harmonieux, mais le travail de Wood et Smith se distingue à quelques détails et, pour résumer, à des optiques différentes.

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Après avoir sauvé un enfant tombé sur les rails du métro, et avoir constaté que les vertus de son lasso sont irrecevables devant un juge et que les témoins se défaussent, Wonder Woman rentre chez elle, dépitée.

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Après un sac de course qui s’éventre et une bonne grosse fatigue (y a des journées comme ça…), l’héroïne s’assoupit, ses rêves étant hantés par des visages grimaçants et hurlants d’anonymes revanchards qui incarnent le caractère inhospitalier du « Monde des Hommes ». La séquence a quelque chose de ditkoïen (ditkoesque ? ditkoïde ?), avec le surgissement du symbolique et de l’allégorique dans la narration. Wood étant un grand ami de Ditko et partageant graphiquement une certaine parenté, ce n’est pas étonnant qu’on retrouve cette impression, même s’il ne fait qu’encrer les dessins de José Delbo.

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À peine remise de son cauchemar, et ne trouvant pas le soulagement dans le dîner qu’elle partage avec Tod, son « intérêt sentimental » du moment, Diana décide de se changer les idées et d’allumer la télé ! Mauvaise idée, malheureuse ! En zappant, la dépressive héroïne est confrontée à un déluge de nouvelles peu réjouissantes : catastrophes naturelles, accidents, déraillements, guerres, assassinats…

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La séquence est peut-être inspirée d’une scène comparable figurant dans le très excellent film de Nicholas Meyer, C’était demain (Time After Time), sorti en salles américaines en août 1979, soit trois bons trimestres avant la parution de Wonder Woman #269. Dans le long métrage, Jack l’Éventreur, incarné par l’impressionnant David Warner, découvre la télévision dans une chambre d’hôtel, et zappe lui aussi sur les nouvelles, découvrant un monde à feu et à sang où il se sent comme chez lui. On remarquera qu’une scène du même genre figure dans le premier tome du Dark Knight de Frank Miller. Décidément, la télévision a un effet néfaste sur les super-héros.

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Estimant ne plus avoir de place dans ce monde devenu fou, Diana contemple une dernière fois les toits de la ville, de nuit, avant de repartir parmi les Amazones.

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La Reine Hippolyte est bien entendu ravie de voir sa fille revenir, mais elle découvre bien vite que la langueur monotone qui étreint le cœur de Diana a un prénom : Steve. Un peu agacée de voir son héritière ainsi hantée par un amour perdu, la souveraine conçoit l’idée de faire oublier ce souvenir douloureux à la princesse. Un coup d’amnésie, ça marche toujours et ça mange pas de pain.

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C’est ainsi que, dans Wonder Woman #270, Hippolyte s’en remet à Aphrodite, à qui elle raconte à nouveau les deux morts de Steve Trevor, et explique son problème. La déesse de l’amour se matérialise et accède à son souhait.

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Elle fait jaillir les « brumes de Népenthes » qui apportent l’oubli. Les volutes violettes atteignent Diana dans son sommeil, et son visage souriant laisse entendre qu’elle se trouve soulagée de son chagrin.

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L’épisode propose deux interludes, intitulés « tableau », dans lesquels on voit décoller un avion de chasse. Tout cela annonce un retournement de situation. En attendant, sur l’Île du Paradis, Diana a repris sa vie d’Amazone, se livrant à la nage, à la pêche et à la protection de sa communauté. Dans une scène symbolique, l’héroïne est comme reconstruite, recomposée, mise à jour.

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Mais les dieux sont farceurs et savent déjouer les attentes des humains qui les sollicitent. Et alors que la Reine est heureuse de voir Diana à nouveau insouciante… un avion de chasse, celui qu’on a vu dans les deux « tableaux », s’écrase devant les rivages de l’île. De la carcasse, Diana sauve un pilote blond, un certain… Steve Trevor !

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Et rebelotte, c’est reparti. Comprenant qu’il y a un monde là, dehors, qui ne demande qu’à être protégé, et un homme qu’il convient de reconduire dans la société qui l’a vu naître, Diana s’apprête à endosser à nouveau son costume étoilé et à quitter à nouveau son île.

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Interloqué par cette vilaine plaisanterie que lui joue le sort, Hippolyte s’adresse à nouveau à Aphrodite (qui ne peut décidément pas glander tranquille en Olympe). Celle-ci explique que ce nouveau Steve Trevor provient d’une Terre parallèle. Les dieux étant, comme les humains, partisans du moindre effort, elle utilise la coutumière métaphore visuelle du chapelet de globes, représentation à laquelle les lecteurs de DC sont habitués.

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Donc, Steve Trevor est un pilote dont le vol expérimental s’est mal passé, franchissant par mégarde les barrières dimensionnelles. Et même Aphrodite semble incapable de retrouver son monde d’origine afin de l’y reconduire (la déesse est une faignasse). Comprenant que Diana et Steve ont pour destin de parcourir le monde ensemble, la souveraine, qui apprend quand même un peu de ses erreurs passées, utilise à nouveau les brumes de Népenthes sur l’ensemble du globe, afin de faire oublier à l’humanité le souvenir du Steve Trevor d’antan et, pour reprendre son expression, de « dégager le terrain » pour les deux tourtereaux.

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Un nouveau tournoi a lieu, qui débouche bien évidemment sur la victoire de Diana (à la page 15 : c’était pas décompressé, à l’époque !!!), qui endosse à nouveau sa tenue étoilée, pose son Trevor sur le siège passager de son avion et décolle vers le « Monde des Hommes ». C’est reparti pour un tour.

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Voilà, Conway a refait les origines de l’héroïne et recréé à nouveau le statu quo de base, dont visiblement la série ne semble pas pouvoir se passer. Steve Trevor est revenu. Mais vous vous en doutez, c’est loin d’être fini… et le plus croquignolet est encore à venir !

Jim

Les multiples mésaventures de Steve Trevor, première partie
Les multiples mésaventures de Steve Trevor, deuxième partie
Les multiples mésaventures de Steve Trevor, troisième partie
Les multiples mésaventures de Steve Trevor, quatrième partie
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