LE SANG DE FU MANCHU (Jess Franco)

REALISATEUR

Jesus « Jess » Franco

SCENARISTES

Harry Alan Towers et Jess Franco, d’après les personnages créés par Sax Rohmer

DISTRIBUTION

Christopher Lee, Richard Greene, Howard Marion-Crawford, Götz George, Maria Rohm…

INFOS

Long métrage espagnol/ouest-allemand/anglais/américain
Genre : aventures
Titre original : The Blood of Fu Manchu
Année de production : 1968

Après avoir travaillé comme scénariste et producteur à la radio dans les années 40 et à la télévision à partir du milieu des années 50, le britannique Harry Alan Towers s’est lancé dans le cinéma au début des années 60, en trouvant rapidement son créneau dans le cinéma d’exploitation. Sa spécialité était le développement de co-productions internationales, le plus souvent librement inspirées par des oeuvres écrites tombées dans le domaine public ou qu’il pouvait acheter à moindre frais. Il montait ensuite une distribution composée d’acteurs de chaque pays et écrivait généralement le scénario lui-même, le plus souvent sous son nom de plume, Peter Wellbeck.

Dans sa filmographie, on trouve ainsi des adaptations plus ou moins fidèles de Jules Verne (Le Grand Départ vers la Lune), Agatha Christie (avec plusieurs versions des 10 Petits Nègres), Robert Louis Stevenson (L’Île au Trésor), Jack London (L’Appel de la Forêt, Croc Blanc de Lucio Fulci), H. Ridder Hagard (King Solomon’s Treasure), Arthur Conan Doyle (deux téléfilms avec Christopher Lee dans le rôle de Sherlock Holmes) ou encore Sax Rohmer, puisque c’est le sujet de ce billet.
Vers la fin de sa carrière, il est même le co-scénariste et producteur de l’une des plus mauvaises adaptations de Stephen King, The Mangler de Tobe Hooper.

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Lorsque Harry Alan Towers acquiert les droits des romans Fu Manchu de Sax Rohmer, le diabolique génie du mal n’était pas réapparu sur grand écran depuis 1940 et un serial en 15 épisodes de la Republic Pictures. Son interprète le plus mémorable était alors Boris Karloff dans Le Masque d’Or de Charles Brabin en 1932…et c’est une autre icône de l’horreur qui a été choisie pour personnifier le personnage pour une nouvelle génération dans une série de cinq films, Christopher Lee. Des années plus tard, l’acteur a résumé son expérience en tant que Fu Manchu par ces termes : « Le premier aurait du être le dernier…car c’était le seul bon film de la série ».

Sortis régulièrement entre 1965 et 1969, les chapitres de la série ont d’abord été confiées à Don Sharp (Le Masque de Fu Manchu, Les 13 fiancées de Fu Manchu) et Jeremy Summers (La Vengeance de Fu Manchu) avant de se retrouver entre les mains du pape de l’euro-trash, l’espagnol Jesus « Jess » Franco, qui mit en boîte à la suite (et pour un budget encore plus modeste que les opus précédents) les deux derniers épisodes, Le Sang de Fu Manchu et The Castle of Fu Manchu (celui-là est tellement cheap que les scènes de destruction sont des stock-shots provenant d’autres films).

The Castle of Fu Manchu sonna le glas de la série mais pas celui de la collaboration entre Harry Alan Towers et Jess Franco qui travaillèrent régulièrement ensemble pendant une décennie, notamment sur Sumuru, la cité sans hommes (Sumuru, pendant féminin de Fu Manchu, est un autre personnage créé par Sax Rohmer), Le Trône de Feu et Les Nuits de Dracula, chroniqués dans ces colonnes.

D’un scénario joliment grotesque (pour se débarrasser de ses ennemis, Fu Manchu lève une armée de femmes assassins capables de tuer d’un baiser grâce au venin d’un serpent inca qui leur a été inoculé), Jess Franco tire un film d’aventures soporifique, pauvrement réalisé (je ne compte même plus les cadrages foutraques) et photographié. La touche exotique est inexistante (alors que le métrage a été tourné en extérieurs au Brésil) et les scènes d’action sont filmées avec des charentaises.
Le scénario incohérent se perd dans des intrigues secondaires inutiles (l’insupportable chef des bandits contraint de travailler pour Fu Manchu après que celui-ci ait tenté de le tuer) au lieu de se concentrer sur Nayland Smith et le Dr Petrie, les vieux ennemis du machiavélique moustachu…Nayland Smith étant l’une des premières victimes du Baiser de la Mort (une mort lente, ce qui laisse le temps de trouver un antidote au bout des interminables 90 minutes).

Le Sang de Fu Manchu n’est pas le long métrage le plus trash de Jess Franco, mais on retrouve bien là quelques passages obligés de son cinéma : le sadisme, les prisons de femmes et une distribution féminine en général peu habillée. Une actrice en particulier s’est d’ailleurs étonnée de sa présence au générique : Shirley Eaton (Goldfinger).
Connu pour sa grande rapidité, Jess Franco a enchaîné le tournage de ses deux Fu Manchu avec celui de Sumuru, la cité sans hommes, dans lequel Shirley Eaton joue le rôle-titre. Et pour étoffer une scène en particulier, Franco a intégré au Sang de Fu Manchu des plans de Sumuru, qui est devenue par la magie du montage « The Black Widow ». Et ce sans payer Shirley Eaton pour sa « participation » au film !

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