Et c’est pas mal.
(Assurément disponible sur readcomicsonline.)
Pour revenir à l’univers DC et à la collection « Chronicles », l’entreprise est louable et passionnante, mais elle a plusieurs écueil.
Le premier, c’est que c’est DC, or on est sur un marché très « Marvel Zombie », à cause de l’histoire éditoriale des deux éditeurs en France (une grosse quinzaine d’années dominées par Lug face à deux autres éditeurs qui publient DC dans le désordre le plus total, puis une petite quinzaine d’années où DC est absent des publications, à l’exception notoire de Batman qui a encore le droit à quelques albums ici et là), ce qui fait que tout un public doit redécouvrir DC malgré les efforts fournis par Semic, un peu Panini et beaucoup Urban ces dernières années, et que des intégrales Marvel, c’est devenu plus facile que des intégrales DC.
Cet état de fait a donc permis à Panini de prendre de l’avance éditoriale en imposant notamment son format d’intégrale, qui a débuté modestement mais qui semble aujourd’hui bien installé. Il reste à Urban à imposer sa formule équivalente sur le marché : la force de cette rédaction, c’est d’assembler des bonus éditoriaux et de proposer des clés d’entrée, un vrai plus. Mais ça va prendre du temps. Leur stratégie visant à « bombarder » en faisant des sorties fréquentes (ce qui est possible sans problème avec Batman) est une bonne approche.
Le troisième souci, c’est que l’univers DC est un univers partagé étalé sur des décennies, avec ses hauts et ses bas. Ses multiples réfections (et donc sa version « post-Crisis ») impliquent aussi des relances qui parfois prennent du temps. C’est vraiment le cas ici. À la relecture de cette période (partiellement traduite en France : les lecteurs connaissent les Wonder Woman de Pérez, les Superman de Byrne et désormais la reprise en main de Batman par Denny O’Neil, de mon côté j’ai récemment découvert les Flash de Mike Baron…), on constate qu’il y a au moins un an, parfois deux, de flottements, de mise en place. Ça s’explique par mille raisons : de nouvelles versions du personnage qu’il faut redéfinir, de nouvelles équipes qu’il faut encadrer, de nouveaux responsables éditoriaux qui apprennent à bosser dans un nouveau cadre, une nouvelle communication à mettre en place et maintenir, le tout provoquant de nouveaux succès (les chiffres de vente de Man of Steel #1 ont constitué un record de l’époque). L’éditeur se retrouve donc à avancer tout en testant encore les limites, pour voir. À mes yeux, parmi les premières grosses séries redéfinies, seule Wonder Woman s’en sort très bien dès le début : on remarquera que l’auteur, son co-scénariste et sa responsable éditoriale sont des gens déjà bien installés dans la rédaction, ce qui facilite le travail : on gagne en efficacité, en temps. Mais les autres séries mettront du temps à trouver leur ton. (Et accessoirement, la série JSA arrive douze ans plus tard, dans un contexte éditorial différent, et n’a pas à trouver sa voie.)
C’est le cas aussi des titres gérés par O’Neil. Sur Detective Comics, il faudra attendre l’arrivée de Grant et Wagner, associés à Norm Breyfogle au dessin, pour que l’électrochoc se produise. Les premières années d’O’Neil, c’est bien, y a des chefs-d’œuvre (Year One, rien que ça) et des runs de premier ordre (Barr et Davis), mais ça tâtonne encore (la prestation de Max Allan Collins en est le signe).
Sauf qu’on parle ici de Batman. Un personnage qui vend, quoi qu’on publie. Et un personnage dont plein d’aventures ont déjà été traduites, ce qui permet de constituer des sommaires en partie composés de réédition (ici Killing Joke, là Death in the Family…), ce qui fait baisser les coûts. Un avantage dont ne dispose pas beaucoup Superman (quelques rééditions possibles) et pas du tout JSA.
Là réside le difficile pari entrepris par Urban.
Jim