REALISATEUR
Ted Kotcheff
SCENARISTES
Michael Kozoll, William Sackheim et Sylvester Stallone, d’après le roman de David Morrell
DISTRIBUTION
Sylvester Stallone, Brian Dennehy, Richard Crenna, Chris Mulkey, David Caruso…
INFOS
Long métrage américain
Genre : drame/action
Titre original : First Blood
Année de production : 1982
À la fin des années 60, le canadien David Morrell est venu étudier la littérature aux Etats-Unis, dans le but de devenir enseignant. Là, il fit la rencontre d’étudiants revenus du Vietnam et en proie à de graves difficultés de réinsertion dans la vie civile. Leurs histoires édifiantes, combinées à la situation explosive d’un pays profondément déchiré, deviendra le sujet du premier roman (et qui reste toujours son plus connu) de David Morrell, First Blood, publié en 1972 : le récit violent de Rambo, ancien béret vert réduit au vagabondage dans son pays après avoir été décoré pour ses faits d’armes. Arrêté par un shérif qui n’apprécie guère les vagabonds, Rambo est victime de brutalités policières, qui lui rappellent les tortures subies au Vietnam. Le vétéran s’évade et une gigantesque traque commence…flics dépassés par la situation et soldats de la Garde Civile inexpérimentés contre une impitoyable machine à tuer…
First Blood a rapidement intéressé le cinéma, mais il aura fallu en tout dix ans pour que le projet aboutisse (à cause de raisons comme la grande violence du roman, le sujet polémique, des désaccords sur la caractérisation des personnages principaux…).
Pendant cette décennie, le film a failli être produit par des grands studios (Columbia, Warner) avant de se faire sous la supervision du studio indépendant Carolco de Mario Kassar et Andrew Vajna. Parmi les acteurs envisagés pour jouer Rambo, il y a eu notamment Steve McQueen, Al Pacino, Nick Nolte, Clint Eastwood, Robert De Niro et même John Travolta. Pour le shérif Teasle, les noms de Lee Marvin, Burt Lancaster, Robert Mitchum et Gene Hackman ont circulé. Et des réalisateurs comme Sidney Pollack, John Badham, Richard Brooks ou encore John Frankenheimer ont un temps été attachés à la mise en scène.
C’est finalement le canadien Ted Kotcheff (le déclencheur du renouveau du cinéma de genre australien avec son Réveil dans la Terreur sorti en 1971) qui a été choisi pour réaliser Rambo. Il a livré avec cette adaptation du livre de David Morrell ce qui est devenu un véritable lien entre le cinéma américain engagé des années 70 et l’actioner des années 80 : le sujet est profond, solidement ancré dans une triste réalité…et l’action est viscérale, brutale et palpitante (les scènes dans la forêt, étouffantes, superbement photographiées par Andrew Laszlo, font partie des meilleures du genre). D’un premier montage de plus de 3 heures (qui avait dégoûté Sylvester Stallone à l’époque), Ted Kotcheff a tiré un long métrage de 90 minutes qui n’a rien perdu de son efficacité et de son intensité.
Lorsque Sylvester Stallone est arrivé sur le projet, sa carrière post-Rocky peinait à décoller. Convaincu par le potentiel du personnage, il a tout de même demandé des modifications (principalement pour humaniser un peu plus Rambo) et a fini par co-signer les dernières moutures du scénario. Dans le roman, Rambo tue tous les flics lancés à sa poursuite. Dans le film, la seule mort, celle du policier sadique, est accidentelle.
Avant de devenir dès le deuxième long métrage (co-écrit par James Cameron) la représentation de l’idéal guerrier américain célébré par le pouvoir reaganien en place (et de plus en plus décérébré), Rambo était beaucoup plus complexe. Un homme brisé, qui déverse sa colère contre un pays qui lui a tourné le dos et son autorité représentée par le shérif abusif Will Teasle. Une « créature » façonnée par un système qui déshumanise pour servir ses intérêts. Une fauve blessé et acculé qui va finir par répliquer jusqu’à craquer nerveusement…une prestation aussi animale qu’humaine et touchante de la part de Stallone, au regard hanté jusqu’au très beau dernier plan (qui aurait d’ailleurs pu mettre un point final poignant à l’histoire de Rambo).
Le trio principal est complété par ces deux excellents acteurs que sont Brian Dennehy (le shérif Will Teasle) et Richard Crenna (le colonel Sam Trautman). Si Brian Dennehy campe parfaitement l’antagoniste dans cette guerre menée dans une petit village montagnarde des Etats-Unis, ses motivations et les raisons de son acharnement, par rapport au roman (d’après les infos glanées sur le net, puisque je ne l’ai pas lu), ne sont tout de même pas assez développées à l’écran (conséquence du montage resserré ?). Cela renforce dès le début la sympathie envers Rambo, la seule voix de la raison étant apportée par le personnage joué par un jeune David Caruso.
Il est maintenant difficile d’imaginer quelqu’un d’autre que Richard Crenna dans le rôle du Colonel Samuel Trautman (qui porte un prénom qui n’est pas anodin…puisque c’est littéralement « l’oncle Sam » qui a « créé » Rambo), mais l’acteur n’a en fait été engagé qu’à la dernière minute (alors que le tournage avait déjà commencé) pour remplacer le légendaire Kirk Douglas, qui a claqué la porte suite à des désaccords concernant son personnage. Dès sa première apparition à l’écran, Richard Crenna impose sa présence, équilibre idéal entre son poulain brisé et un shérif qui a soif de sang, et déclame ses dialogues avec autorité…avant de rester sans voix face au désarroi de l’homme dont il a fait une machine de guerre.
Des prestations puissantes au service d’une oeuvre nerveuse, rythmée par l’inoubliable bande originale de Jerry Goldsmith !
It’s a long road
When you’re on your own
And it hurts when they tear your dreams apart