REALISATEUR
Sam Raimi
SCENARISTE
David Koepp, d’après le comic-book de Stan Lee et Steve Ditko
DISTRIBUTION
Tobey Maguire, Willem Dafoe, Kirsten Dunst, James Franco, Rosemary Harris…
INFOS
Long métrage américain
Genre : action/science-fiction
Année de production : 2002
PARTIE 1 - « Who am I ? You sure you want to know ? » :
« These weirdo’s all gotta have a name now. »
Pendant longtemps, et cela jusqu’à l’aube du 21ème siècle, les adaptations potables des comics Marvel ne se bousculaient pas vraiment au portillon (durant les 20 ans séparant Superman & Blade), à de très rares exceptions près (telle la série tv L’Incroyable Hulk avec la paire Bixby/Ferrigno, adaptant très librement le matériau original), DC/Warner ayant alors généralement plus de chance dans ce domaine (quand bien même les films Superman et Batman ont souffert d’un même écueil, à savoir un effet de yoyo qualitatif au cours de leurs quatre volets respectifs, de Donner à Schumacher en passant par Lester, Furie et Burton).
« Can Spider-Man come out to play ? »
Alors que le tisseur avait réussi à prospérer du côté du petit écran dès la décennie de sa création (essentiellement grâce aux multiples cartoons pour chaque décade), son passage dans le domaine des adaptations live s’est avéré beaucoup plus laborieux sur le long terme (là où les fan-films n’ont eux pas tardé).
« He doesn’t want to be famous ? I’ll make him infamous ! »
Suite aux 1ère versions des années 70 (la série tv cheap avec le fadasse Nicholas Hammond ou encore la version sentai de la Toei) et 80 (les projets avortés de Roger Corman et des cousins Golan & Globus), le développement du film Spider-Man chez Carolco au cours des années 90 partira à vau-l’eau, en raison d’un imbroglio juridique empêchant pour de bon l’aboutissement du projet de James « T2 » Cameron (parti s’occuper entretemps de True Lies puis Titanic).
« The Human Spider ? That’s it. That’s the best you got ? »
Il est intéressant de noter que les toiles organiques, un apport souvent attribué à James Cameron, sont en réalité une constante des différents scripts (celui de Leslie Stevens en particulier) depuis la version de la Cannon. Les producteurs Golan & Globus, pas du tout familiers de l’univers du tisseur, encouragent alors cette idée d’une transformation monstrueuse, jusqu’au stade du velu « Man-Spider » (un moyen de lorgner sur La Mouche version Cronenberg ?). Une approche résolument horrifique qui explique le choix initial du réalisateur (Tobe « Massacre à la Tronçonneuse » Hooper).
« Back to formula ? »
Avant même que Toy Biz ne sauve les miches de Marvel suite à sa banqueroute, Avi Arad (le fondateur de « Marvel Films », plus connu aujourd’hui sous le nom de « Marvel Studios ») était déjà bien impliqué dans la production d’adaptations. Après avoir été un acteur-clé du lancement de la série animée X-Men de 1992 (dont le grand succès incitera la Fox à donner le feu vert pour la production d’un film X-Men, soit un effet « boule de neige » ayant des ramifications jusqu’aux films actuels), Arad a repris à cette période le rôle autrefois tenu par Stan Lee, consistant à démarcher les exécutifs d’Hollywood, mais cette fois en supervisant de plus près les projets d’adaptations.
Celui-ci veilla d’autant plus au grain après avoir été échaudé par le cas de figure du fauché Fantastic Four de Corman, légèrement moins pire que le film Captain America de 1990. Tandis que du côté du petit écran, le bilan n’était guère plus positif (le pilote de Generation X, Nick Fury dans sa version Hasselhoff pré-MCU).
« They’re crap. Crap, crap. Megacrap. »
Suite à un été 1997 déplorable sur le plan de la qualité des comic-book movies (marqué par LE trio de la loose, constitué de Batman & Robin , Spawn et Steel , plus la cerise moisie sur le kloug qu’est le téléfilm consacré à la Justice League « Bwah-Ha-ha »), le genre avait de quoi tomber en désuétude pour un bon bout de temps (DC/Warner n’ayant eu d’autre choix suite à ces échecs que de se retrancher sur ses productions télévisuelles, de toute façon bien plus plébiscitées par un public habitué à faire l’éloge de Batman: The Animated Series).
Cependant, contre toute attente, les graines du renouveau ont été plantées dans ce paysage sinistré avec la sortie de Blade (tourné début 97), pour mieux fructifier avec le premier X-Men en l’an 2000 (tandis que Spider-Man réussira quant à lui l’exploit de surpasser L’Attaque des Clones au box-office, un signal fort pour le genre en particulier et pour Hollywood en général).
« Commencement: The end of one thing, the start of something new. »
L’année 1998 constitue à ce titre un tournant, entre la fusion de Toy Biz et Marvel (afin de tirer un trait de manière définitive sur la période sombre de la banqueroute), le lancement de la première vague de titres de la nouvelle gamme « Marvel Knights » (soit le début de l’ascension de Joe Quesada vers son futur poste), et la sortie du film Blade (une dizaine d’années après l’ovni Howard the Duck de Lucasfilm). Dès lors, la revitalisation de la branche édition se fera en parallèle de l’essor d’une nouvelle vague d’adaptations cinématographiques (un sujet sur lequel s’attarde le documentaire Marvel: Renaissance).
« There’s only one who can stop us. »
Entretemps, il aura fallu un accord à l’amiable entre MGM et Columbia/Sony (impliquant l’échange des droits de Spidey contre une partie de ceux d’un certain espion britannique amateur de martinis) pour que la situation s’éclaircisse enfin en 1999 (l’année où Matrix se terminait avec un Neo imitant Superman, annonçant en quelque sorte le retour en fanfare des super-héros sur grand écran, mais aussi et surtout la myriade de possibilités permises par les « CGI », de plus en plus utilisés depuis Abyss & Terminator 2).
« Remember, with great power comes great responsibility. »
Une fois ces obstacles surmontés, il reste encore à trouver à trouver un réalisateur : Chris Colombus préfère Harry Potter, Ang Lee privilégie Hulk, tandis que l’envie de David « Seven » Fincher d’adapter la mort de Gwen Stacy (un arc finalement porté à l’écran 15 ans plus tard), une perspective intriguante sur le papier, n’était pas forcément le plus pertinent, car un peu trop sombre et pessimiste pour un premier volet introductif visant un large public (enfants, adolescents, adultes/parents biberonnés à Strange & Cie).
« Nice to have a fan. »
Heureusement, les grands pontes (Avi Arad, Amy Pascal, etc) ont fait le bon choix lors de cette période faste pour les blockbusters US, qui aura vu l’arrivée de deux noms emblématiques du cinéma d’horreur frappadingue des 80’s/90’s (Sam « Evil Dead » Raimi et Peter « Braindead » Jackson) sur d’ambitieuses adaptations au cinéma d’oeuvres phares de la culture populaire des 50’s/60’s ( Le Seigneur des Anneaux et Spider-Man).
« Instruct him in the matters of loss and pain. Make him suffer. Make him wish he were dead. »
Quand il s’agit d’associer le super-héros poissard par excellence (se percevant comme tel en tout cas) à un réalisateur connu pour prendre un malin plaisir à malmener ses personnages principaux (Ash en particulier), il y a comme une heureuse concordance, d’autant plus que Sam Raimi (Mort sur le Grill), contrairement à Bryan Singer avec les X-Men, est un fan de la première heure du tisseur (d’où son anecdote à propos de l’illustration sur le plafond de sa chambre d’enfant), qu’il a découvert à la fin des années 60 grâce à un de ses frangins (Ivan le docteur plutôt que Ted l’acteur, tous deux associés à cette trilogie par la suite).
« Incredible ? What do you mean he’s incredible ? »
Le réalisateur dispose en plus d’ un pedigree à même de rassurer les exécutifs, entre un Darkman qui avait déjà démontré son fort taux de compatibilité avec le genre (un jalon important, marquant les débuts de sa collaboration avec Danny Elfman, Bob Murawski et Bill Pope, tout autant de maillons essentiels au succès de sa trilogie arachnéenne), une carrière assez versatile (passant d’un genre à un autre, plutôt que d’être cantonné à l’horreur comme Romero) et sa fine connaissance du médium (puisque rompu à la narration séquentielle des comic-books, très proche en cela du domaine des storyboards dans lequel se sont justement recyclés certains dessinateurs tels que Mike Ploog ou Kerry Gammill).
« We are who we choose to be. Now, choose ! »
De plus, durant les dix ans séparant les tournages respectifs d’Army of Darkness et Spider-Man , Raimi s’est diversifié en tant que réalisateur (Un plan simple, souvent réduit à sa parenté avec le Fargo de ses anciens compères que sont les frères Coen) et producteur exécutif avec bon nombre d’oeuvres variées, alternant au cours des années 90 entre certains succès (Hercule et son spin-off Xena, des « JCVD flicks » comme Timecop ou Hard Target) et les flops de séries tv ayant peinés à trouver leur public (American Gothic ou encore le show M.A.N.T.I.S., mettant en scène un jeune super-héros noir et handicapé).
« Out, am I? »
Le cas particulier de The Quick and the Dead (Mort ou Vif en VF), ce western très sombre mâtiné d’exercice de style virtuose, est sans doute le plus significatif du lot, tant son bide au box-office aura poussé son auteur à changer son approche visuelle (en gros, adapter sa mise en scène en fonction des besoins du sujet plutôt que l’inverse, sa caméra virevoltante ayant ainsi fini par cesser de voler la vedette aux acteurs), mettant ainsi à partir de là plus l’accent sur la direction d’acteurs que sur une « caméra prima donna » (très discrète dans Pour l’amour du jeu).
Il aura fallu attendre un Intuitions (2001) à la lisière du fantastique pour que ses anciens effets de style refassent surface avec parcimonie (la preuve qu’il a retenu cette leçon à son avantage), un équilibre également atteint dans ses 4 films suivants (l’ordinaire mêlé à l’extraordinaire dans Jusqu’en Enfer et la 1ère trilogie Spider-Man).
« Wake up, little spider. Wake up. »
Avec la résolution des droits cinématographiques du tisseur à partir de 1999, le changement d’orientation de la filmographie post-Mort ou Vif de Sam Raimi (Le Monde Fantastique d’Oz, Doctor Strange in the Multiverse of Madness), et l’avancée de la technologie numérique durant cette décennie, permettant d’enfin pouvoir représenter à l’écran la gestuelle spécifique du monte-en-l’air, c’est peu dire que les étoiles du Zeitgeist/air du temps se sont alignées au moment adéquat (Scott Mendelson: « The film was the right movie at the right place at the right time »).
À suivre…