Je viens de relire West Coast Avengers: Zodiac Attack, un recueil reprenant deux Annuals ainsi qu’une grosse poignée d’épisodes de la série du temps d’Englehart.
J’ai quelques recueils de cette série en VO, que je relis dans le désordre, en fonction de l’inspiration quand je passe devant le rayon. Et là, je voulais replonger dans l’histoire contenue dans les deux Annuals.
Tout commence donc dans West Coast Avengers Annual #2, où les deux équipes de Vengeurs s’affrontent lors d’un match de base-ball. Mais ceux de la Côte Ouest découvrent soudain leurs équipiers morts. Aidés du Surfer, ils se rendent dans le vaisseau du Collector, acceptent de « mourir », puis affrontent leurs homologues ans l’après-vie, où ils croisent le Grandmaster.
Le récit s’impose en suite du premier Contest of Champions, avec également un petit air du légendaire affrontement entre Vengeurs et Défenseurs, déjà orchestré par Englehart à l’époque. C’est sympa, ça gigote, mais c’est encore un énième affrontement de héros. On notera que le scénariste ne se montre pas très féministe puisque toutes les héroïnes engagées dans des duels perdent.
Le résultat des courses, c’est que le Grandmaster l’emporte, et s’empare du pouvoir de sa concurrence, Death. L’épisode se conclut sur un roulement de tambour et un rire sadique. La suite se déroule dans Avengers Annual #16, qui a la particularité d’être illustré par des équipes artistiques inédites (John Romita Jr et Bill Sienkiewicz, Keith Pollard et Al Williamson, Marshall Rogers et Bob Layton, Jackson Guice et Kevin Nowlan, Ron Frenz et Bob Wiacek), encadrées par une introduction et une conclusion signées Bob Hall et Tom Palmer. Ça fait de ce numéro un petit bijou, une gourmandise pour les yeux.
Le scénario est signé Tom DeFalco, et montre que le Grandmaster est décidé à détruire une bonne partie de la galaxie en accord avec sa maîtrise des pouvoirs de la mort, mais qu’il ne renonce pas à un nouveau jeu, et laisse les Vengeurs tenter de l’arrêter.
Tout cela est joliment capillotracté, et le sel de l’intrigue repose sur le fait que les deux groupes de héros sont confrontés à des figures de leur passé, des défunts convoqués par le Grandmaster qui peut rappeler les morts. On remarquera que, depuis lors, certains de ces personnages sont revenus, pour la bonne raison qu’ils n’étaient pas réellement morts (Cap affronte Bucky, par exemple). Cela pose, au-delà même de l’aspect méta du truc, la question de la Mort (le personnage / concept, pas l’événement) chez Marvel. On serait chez Méphisto, on pourrait se dire qu’après tout, le démon fait apparaître une version du personnage, nourrie des souvenirs ou des émotions de ses proches, mais là, c’est la Mort elle-même dont le Grandmaster détourne les capacités, donc on est en droit d’imaginer que ce sont vraiment les morts. Après, il est toujours possible d’imaginer que les morts, une fois morts, chez la Mort, ne peuvent être ramenés, et que ce ne sont que des échos que l’on voit ici, ou encore que les pouvoirs de la Mort sont amoindris quand d’autres qu’elle en font usage… Mais bon, les explications deviennent aussi capillotractées que l’intrigue.
Bref, les duels se succèdent, et à la fin, Hawkeye parvient à entraîner le Grandmaster dans un nouveau pari. Le Doyen de l’Univers ne peut résister, mais l’archer triche et parvient à sauver l’univers. Un diptyque sympathique, mais un brin bancal dans ses deux parties, où la deuxième propose des pages magnifiques.
Le sommaire du recueil intègre ensuite plusieurs épisodes de la série mensuelle West Coast Avengers. En commençant par le numéro 25, qui voit Wonder Man affronter l’Abomination (possédée par l’esprit de Tyrannus : va falloir que je lise l’Annual de Hulk en question pour savoir de quoi il retourne…) puis se rendre compte que sa place au sein de l’équipe est plus importante à ses yeux que sa carrière d’acteur de cinéma.
L’épisode est un récit de doute, de questionnement, de départ et d’arrivée. Moon Knight, de son côté, s’interroge sur son implication dans l’équipe, tandis que La Espirita quitte le groupe après avoir constaté qu’elle n’est pas « morte » avec ses équipiers dans l’Annual précédent. C’est donc un épisode de transition, mais sans grande envergure cependant.
Néanmoins, il y a un plaisir malicieux a suivre la parodie de Dino De Laurentiis dans cet épisode, qui voit l’acteur super-héroïque triompher lors de la sortie du film Arkon IV (où il incarne un méchant, d’ailleurs : ses yeux naturellement rouges évitent, on s’en doute, de lourds frais d’effets spéciaux au producteur dont la pingrerie est légendaire), ce qui est un moyen d’évoquer la sortie, plusieurs années plus tôt, du premier Conan avec Schwarzenegger. Bon, De Laurentiis est transparent. En revanche, je ne suis pas sûr de savoir qui se cache derrière Menachim, cet autre producteur aux lunettes extravagantes ? Menahem Golan ?
Dès l’épisode suivant, Englehart enchaîne sur une intrigue impliquant le Zodiac. J’ai pour ma part une relation ambivalente à l’égard de ce groupe d’ennemis : je suis toujours content de les voir revenir, parce qu’ils sont plein de costumes colorés et de pouvoirs rigolos et incarnent une forme de « n’importe quoi » propre aux comics de super-héros, mais je n’arrive pas à m’attacher aux personnages, qui sont souvent anonymisés dans des intrigues à coups de théâtre (à part Van Lunt, le premier Taurus, et le premier Libra, et la succession de divers Scorpio accrochés à leur « clé », les membres ne sortent pas du lot), et j’ai du mal à visualiser leur histoire au long cours, composée de sagas souvent sympas mais oubliables.
Et là, Englehart nous livre une sorte de coup d’état au sein du groupe, où Jake Fury, le LMD copié sur le frère mort de Nick Fury, prend le pouvoir, tue les prédécesseurs (sauf Van Lunt) et les remplace par des LMD de sa fabrication.
Le choix de cette approche, à savoir raconter l’après-putsch (au lieu par exemple de chroniquer une guerre entre les deux groupes, au milieu de laquelle se trouveraient les héros, pris entre deux feux), me semble contreproductif. D’une part, les nouveaux membres du Zodiac, bien décidés à reconstituer leur cartel, sont à la recherche de liquidités, et ça réduit donc cette équipe de super-vilains au rang de super-cambrioleurs.
Ensuite, le scénariste joue la carte de l’infiltration : la clé du zodiaque permet à Scorpio de créer un nouveau Sagittarius, un archer à la ressemblance de Hawkeye. Là, pour le coup, Englehart en tire un certain sel, puisque l’androïde mécanique se montre assez distant, faisant que Mockingbird interprète cela comme une fâcherie après la possible découverte de son secret (elle a laissé mourir le Phantom Rider dans le passé…). Cela donne aussi des scènes rigolotes, comme la visio-conversation avec un Nick Fury sorti de la douche, qu’il prend visiblement avec son inséparable cigare.
Mais au-delà de ces scènes amusantes, Englehart enchaîne les séquences de baston. Il rajoute une couche de trahison avec une fausse Tigra devenue le nouveau Leo.
Le scénariste donne ici l’impression d’ajouter péripétie sur péripétie, et l’action se résout dans l’épisode 28, où les héros sont projetés dans la dimension dont la clé est originaire, occupée par la Brotherhood, une fraternité uniquement vouée au conflit (et qui s’en délecte par l’entremise d’intermédiaire, les membres du Zodiac). La fin est un peu rapide, et quand, comme moi, on n’a pas en tête les vieux épisodes de Conway sur Iron Man et Daredevil, tout cela est sympathique, coloré et bondissant, mais un peu confus.
L’épisode 29 apporte un mieux évident, notamment parce qu’il est construit autour d’un événement unique, la traque de Taurus menée par Moon Knight. Cette unité d’action (associée à une unité de temps, une soirée, et une presque unité de lieu) bénéficie aussi d’un très beau traitement graphique, Machlan noyant les dessins de Milgrom sous un déluge de trames du meilleur effet.
Dernier épisode du recueil, West Coast Avengers #30 est écrit et dessiné par Milgrom, et raconte comment des extraterrestres étudient les Vengeurs afin de déterminer si la Terre est facile ou non à conquérir. Le récit met en avant Moon Knight, confirmant son officialisation dans le groupe, et se conclut sur une chute assez amusante.
Dans mon souvenir, les épisodes avec le Zodiac étaient un peu un moment faible de la série. La relecture me laisse dans le même état d’esprit, et je continue à préférer la saga avec le Peuple-Chat, le voyage temporel ou l’épopée de Pym contre ses vieux ennemis, qui sont autant de belles occasions de visiter le monde Marvel et de pousser les héros en avant. Ici, cette lutte contre le Zodiac me semble passer à côté de son potentiel, malgré quelques jolies caractérisations.