L'AU-DELÀ (Lucio Fulci)

REALISATEUR

Lucio Fulci

SCENARISTES

Dardano Sachetti, Giorgio Mariuzzio et Lucio Fulci

DISTRIBUTION

Catriona McColl, David Warbeck, Cinzia Moreale, Antoine St-John, Veronica Lazar…

INFOS

Long métrage italien
Genre : horreur
Titre original : …E tu vivrai nel terrore! L’aldilà
Année de production : 1981

En 1927, un artiste logeant dans un hôtel de la Nouvelle-Orléans est accusé de sorcellerie à cause des visions infernales qu’il dépeint dans ses oeuvres. Il est alors crucifié par une foule enragée et défiguré à la chaux vive.
50 ans plus tard, Liza hérite de l’hôtel. Les travaux se passent mal et sont émaillés d’accidents. Elle rencontre alors Emily, une jeune aveugle qui lui révèle que l’hôtel est construit sur l’une des sept portes de l’enfer et qu’une fois ouverte, les morts déferleront sur Terre pour dévorer les vivants…

Symphonie morbide et putride, L’Au-delà représente l’apogée du style Fulci, où onirisme et horreur se conjuguent en une succession de tableaux d’une grande violence, qui mettent mal à l’aise et effrayent autant qu’ils fascinent. Le tableau est d’ailleurs une figure récurrente, puisque c’est la représentation de l’indicible (et en parlant d’indicible, le livre d’Eibon, création de Clark Ashton Smith reprise ensuite par Lovecraft est un autre élément important du cauchemar qui se déroule sous nos yeux) par l’infortuné Zweick qui déclenche les événements qui apporteront l’Enfer sur Terre. Le thème pictural revient régulièrement pendant le film, que ce soit par le soin apporté à l’image, superbement travaillée, ou par la symbolique de l’apocalyptique final.

Comme souvent dans les films d’horreur de Fulci, le scénario ne se distingue pas par sa linéarité (ce qui se ressent surtout dans un premier acte qui n’a pas une grand cohérence dans son déroulement). On est plus ici dans une plongée dans la folie, dans une Nouvelle-Orléans lugubre envahie progressivement par les morts, dans laquelle le quotidien de l’héroïne principale bascule après une rencontre fantômatique…la trame, on peut presque l’oublier pour se laisser envouter par une atmosphère quasiment surréaliste qui ne se dément pas pendant 80 minutes.

Bien entendu, il s’agit d’un Fulci et le film ne manque donc pas de scènes gores particulièrement effroyables, de visions de corps en décomposition et de moments chocs (les personnages énuclées, les gorges arrachées…et mon petit moment de terreur personnel, arachnophobe que je suis, l’architecte attaqué par des araignées sorties de nulle part…rien que d’y penser, j’en ai des frissons).
Pour la petite histoire, le monteur Bob Murawski (de Grindhouse Releasing qui a restauré le film pour les U.S. en 1998) a utilisé un furtif plan de cette scène dans le Spider-Man de Sam Raimi.
L’attaque des zombies dans le dernier acte (morts-vivants rajoutés sur l’insistance des distributeurs allemands pour surfer sur la vague des succès récents) est un modèle de réalisation, de suspense et d’angoisse…même si on a souvent envie de crier au héros d’arrêter de gaspiller ses balles et de viser dans la tête (ou alors c’est qu’il pousse très loin son côté cartésien).

Porté par des acteurs familiers de l’univers macabre de Fulci (dont la britannique Catriona McColl et le néo-zélandais David Warbeck), rythmé par une musique entêtante, L’Au-delà est un chef d’oeuvre du genre, à la puissance horrifique indéniable.

1 « J'aime »

Un film magnifique, même si ça peut paraître bizarre de dire ça pour un film particulièrement gorasse. Même si j’aime énormément « Frayeurs » (dans la même veine, peut-être un brin moins envoûtant mais tout aussi mémorable), celui-ci se distingue par des moments de grâce, comme certains plans qui dévoilent le génie technique de Fulci (un travelling avant d’anthologie, sur l’autoroute) ou certaines séquences, la dernière, très troublante et superbe, en tête.
J’aime bien cette veine du zombie « infernal » (fût-ce imposé pour des raisons commerciales), comme dans « Frayeurs », qui change des météores de l’espace et autres virus pathogènes au-delà du raisonnable. Y’a un truc plus morbide et putride encore dans cette idée, qui colle parfaitement aux ambiances développées par Fulci.

Il lui manque une dent à la dame ?

J’aurais misé sur un plombage, mais il semble bien que tu aies raison. Rhaaa la la, ces zombies : aucune hygiène dentaire.
(en fait c’est même pas un zombie, si mes souvenirs sont bons…)

Il a le don pour poser les bonnes questions, le Soy’ ! :mrgreen:

Ecoute … c’est un métier et je m’entraîne toute la semaine à ne faire que ça ! :mrgreen:

Je ne connais pas très bien Fulci (en fait, l’horreur italienne en général, d’ailleurs…), donc je vais sans doute dire de grosses âneries (mais ça ne sera pas la première fois), mais ce qui m’indispose un peu dans ce genre de films (outre l’horreur en tant que telle, parce que je suis une petite créature fragile), c’est une certaine forme de lenteur. Ça crée des ambiances formidables, presque contemplatives, parfois, mais il y a une certaine complaisance au sang qui me semble ruiner tout dynamisme. Par exemple, les deux scènes avec les yeux (de mémoire, le plombier et la femme de ménage), c’est assez sec et rapide, on a le temps de le voir venir mais pas de se tortiller sur son siège. Mais la scène des araignées, citée plus haut, elle est insupportable parce qu’elle est longue, surtout. Alors je me doute que c’est voulu, mais j’avoue que je n’ai guère été « éduqué » à ça, en termes de culture cinéma. Du coup, certains choix font que je passe sans doute à côté de quelque chose.
Après, L’Au-delà, c’est vraiment une ambiance lovecraftienne, même si c’est à la Nouvelle-Orléans. Le tout début m’a bien entendu évoqué Pickman’s Model, même si c’est pas la même intrigue, mais il y a l’idée de l’homme seul et de sa peinture monstrueuse.
Une question, enfin, pour éclairer l’inculte que je suis : l’idée des zombies qui sont le résultat d’un trop-plein de l’au-delà, d’un enfer qui déborde, est-ce que ça vient des Italiens ?

Jim

Oui et non. Tout le zombie rital, mené par Fulci notamment, découle du succès de Dawn of the dead dans lequel cette idée est évoquée. Elle est ensuite pris en main par le cinéma d’exploitation italien.

(grosso modo)

(par contre n’ayant jamais regardé le montage américain de Dawn of the dead, je me demande si le montage de Dario Argento n’a pas accentué cet aspect)

Ca fait longtemps que je n’ai pas vu l’Au-delà par contre mais je trouve que des films comme L’enfer des zombies (qui reste pour moi le chef d’oeuvre du genre en ce qui concerne le cinéma italien), L’avion de l’apocalypse ou Demons (dans un genre annexe) ont beaucoup moins ce rythme hérité du giallo

Oui, le fameux « quand il n’y a plus de place en enfer, les morts reviennent sur Terre »…

L’Au-Delà, c’est certainement mon Fulci préféré, avec ce film Lucio n’usurpe vraiment pas son titre de Poête du Macabre ! ^^

La scène des araignées ne m’a pas parut longue ou lente, le montage, les mouvement de caméra, tout est parfait (et je suis arachnophobe, hein ! ^^) !
youtu.be/RUqqVo0JxM4

Je l’ai vu très jeune la première fois (entre 10 et 12 ans, lors de sa toute première diffusion sur Canal+), et la scène dans l’hopital avec la bouteille d’acide qui tombe sur la mère… Un choc ! ^^ Un traumatisme cinéphilique, un vrai cauchemar ! J’adore !^^

Très bel article, Doc ! :slight_smile:

Merci ! :wink:

Tiens, maintenant que tu promènes à nouveau ta carcasse décomposée dans le coin, j’ai bien envie de connaître ton avis sur La Maison près du Cimetière.

j’en garde un bon souvenir, mais très flou, ça fait très longtemps que je ne l’ai pas revu celui-là ([size=85]faudra que je me chope le dvd, un de ces jours, je l’avais en vhs !^^[/size]), je serai bien incapable d’en dire quoi que ce soit… :confused:
[size=85]Mais le prochain Fulci (jamais vu) que je prendrai sera sans doute le blu-ray du Venin de la Peur qui sort en septembre chez Artus ! ; )[/size]

Oui, le boulot d’Artus Films est excellent…la plupart des bisseries que j’ai chroniquées cette année sont sorties chez eux, d’ailleurs…et j’en ai encore quelques-unes en réserve… :wink:

Rhaaaaaa, « Le Venin de la Peur » : un fabuleux giallo, celui-là, avec un casting féminin à tomber à la renverse en prime. L’ouverture du film est une pure merveille (une scène onirique torride).

[quote=« Le Doc »]

Oui, le fameux « quand il n’y a plus de place en enfer, les morts reviennent sur Terre »…[/quote]

Mais j’avais toujours pris ça comme une boutade, pour ma part, pas comme une « réalité ». Je veux dire, il m’a toujours semblé que les zombies italiens étaient teintés d’une magie, d’un surnaturel qui ne sont pas présents chez Romero. Mais là encore, c’est peut-être mon inculture en la matière qui me fait dire ça.

Jim

Tu ne te trompes pas : les zombies de Romero ont bien une origine « scientifique ». La remarque du perso joué par Ken Foree était un effet de style, devenu la tagline du film…
Pour la veine italienne du zomblard, il y a un peu de tout : ceux de Fulci sont d’origine surnaturelle (encore que : pas ceux de « L’Enfer des Zombies » si mes souvenirs sont bons), mais pas ceux de Umberto Lenzi pour « L’Avion de l’Apocalypse », par exemple.
Historiquement, le genre reste attaché à la veine « magique » et plus spécifiquement au vaudou, dès les origines, avec « White Zombie » en 1932, et « I Walked With A Zombie » de Jacques Tourneur quelques 10 ans plus tard. Le zombie y était d’ailleurs autant une menace qu’une victime / outil du vrai méchant de ces films. Romero va changer tout ça en 1968 avec « La Nuit des Mort-vivants », où il met au point son système de zombie comme allégorie sociale.

C’est pour ça que Lord a répondu « oui et non », je pense. Sans la réplique de Peter/Ken Foree, je ne sais pas si Fulci serait parti dans cette direction tant le film de Romero fut un électro-choc pour le cinoche d’horreur italien.
D’ailleurs, je la préfère à la théorie scientifique furtivement évoquée dans La Nuit des Morts-Vivants (même si j’adore La Nuit qui reste un de mes films d’horreurs préférés)…

Au fait, je parle de White Zombie ici

yep. Pour Romero le zombie dépasse son origine vaudou pour devenir autre choses. Il y a une explication scientifiques (radiation suite à la chute d’un satellite dans La nuit des morts-vivants il me semble) et j’aime bien le fait que Zombie fasse le lien avec toute les itérations de cette figure

(même en dehors du film via les deux montages l’un de Romero et l’autre d’Argento)

C’est du vaudou dans L’enfer des Zombies même avec l’ajout « scientifique » du toubib sur l’ile

[quote=« Photonik »]Tu ne te trompes pas : les zombies de Romero ont bien une origine « scientifique ». La remarque du perso joué par Ken Foree était un effet de style, devenu la tagline du film…
Pour la veine italienne du zomblard, il y a un peu de tout : ceux de Fulci sont d’origine surnaturelle (encore que : pas ceux de « L’Enfer des Zombies » si mes souvenirs sont bons), mais pas ceux de Umberto Lenzi pour « L’Avion de l’Apocalypse », par exemple.
Historiquement, le genre reste attaché à la veine « magique » et plus spécifiquement au vaudou, dès les origines, avec « White Zombie » en 1932, et « I Walked With A Zombie » de Jacques Tourneur quelques 10 ans plus tard. Le zombie y était d’ailleurs autant une menace qu’une victime / outil du vrai méchant de ces films. Romero va changer tout ça en 1968 avec « La Nuit des Mort-vivants », où il met au point son système de zombie comme allégorie sociale.[/quote]

Le zombie vaudou, à l’origine, n’est même pas mort. C’est un comateux dans un état second, une sorte d’esclave à tout faire, dont la volonté est inféodée à celle de son « maître ».
Mais j’aime vraiment bien l’idée de l’enfer qui déborde, hein.
J’ai vu White Zombie, mais je ne crois pas avoir vu le Jack Tourneur. Et ça, va falloir que je répare l’erreur. L’Enfer des zombies, c’est celui sur l’île, non ? J’avais pas tilté que c’était Fulci aussi.
Ah, ça part dans tous les sens, ce genre-là.

Jim

…dont le titre français est d’ailleurs Vaudou.