REALISATEUR
John Carpenter
SCENARISTE
Bill Phillips, d’après le roman de Stephen King
DISTRIBUTION
Keith Gordon, John Stockwell, Alexandra Paul, Robert Prosky, Harry Dean Stanton…
INFOS
Long métrage américain
Genre : horreur
Année de production : 1983
John Carpenter ne s’en est jamais caché : Christine, l’adaptation du roman de Stephen King, était pour lui « un simple job » et pas « un projet personnel »…quelque chose dont il avait besoin à ce moment précis de sa carrière après l’échec de The Thing.
The Thing est toujours un des longs métrages que Big John préfère dans sa filmographie et c’est incontestablement l’un de ses meilleurs films…mais à l’époque de sa sortie, un été 1982 dominé par le E.T. de Steven Spielberg, ce remake de La Chose d’un Autre Monde de Christian Niby et Howard Hawks fut démoli par la critique (mais pas que…) avant de gagner progressivement ses galons de film culte.
Pour se refaire après cet échec critique et financier, John Carpenter était en train de travailler sur une adaptation de Stephen King…Charlie (Firestarter en V.O.) et sa petite fille dotée du pouvoir de pyrokinésie. Mais il finit par quitter le projet, suite aux fameuses « différences créatives » (Charlie a finalement été réalisé par Mark Lester en 1984). Il accepta alors la proposition du producteur Richard Kobritz de mettre en scène pour la Columbia Christine, dont les droits cinématographiques avaient été achetés avant même la parution du bouquin (qui est sorti quelques jours après le début du tournage).
1983 fut d’ailleurs une bonne année pour les transpositions des romans de Stephen King au cinéma puisque se sont succédé Christine, Cujo de Lewis Teague et Dead Zone de David Cronenberg.
De l’aveu de John Carpenter, sa partie préférée du processus de création sur Christine fut le travail avec les acteurs. Le scénario prend son temps pour s’attacher à ses personnages et décrire la métamorphose d’un lycéen au physique ingrat qui débute dès qu’il tombe véritablement amoureux d’une étrange voiture. L’achat d’une voiture représente pour lui la première étape du passage à l’âge adulte, qui prend ici la forme d’une allégorie cauchemardesque. L’acteur Keith Gordon exprime avec talent les différentes facettes de Arnie Cunningham, que l’on peut considérer comme un équivalent masculin de Carrie White, l’héroïne malheureuse du premier roman publié de Stephen King.
Face à lui, John Stockwell est Dennis, son pote d’enfance, qui dépasse le cadre du beau gosse du lycée star de l’équipe de foot pour en faire quelqu’un de profondément sympathique. Entre Arnie et Dennis, la complicité est toute de suite visible et cela rend d’autant plus crédible l’incompréhension et la tristesse de Dennis lorsqu’il assiste aux changements qui s’opèrent en son vieil ami sous l’influence de Christine. La jolie Alexandra Paul (Alerte à Malibu), dont c’était un des tout premiers rôles au cinéma, complète la distribution principale…et un improbable triangle amoureux !
John Carpenter a-t-il été le catalyseur des carrières de réalisateurs de Keith Gordon et John Stockwell ? C’est bien probable puisqu’il se dit que les deux jeunes comédiens se montraient déjà très intéressés par cet aspect de la création cinématographique pendant le tournage de Christine. John Stockwell a par la suite réalisé des films comme Blue Crush, Bleu d’enfer et Paradise Lost. Keith Gordon a signé de nombreux épisodes de séries télévisées dont Wild Palms, Dexter, Homeland et The Leftovers.
John Carpenter a eu plus de mal à faire de Christine une voiture menaçante (il la trouvait même trop « mignonne » pour cela). Dans le roman, la voiture est hantée par l’esprit de son précédent propriétaire. Cet élément est absent de la version filmée, dans laquelle la voiture est une force maléfique dotée d’une vie propre dès sa sortie de la chaîne de montage. Carpenter a par la suite regretté cette décision, qui a selon lui réduit le potentiel effrayant du film. Christine est en effet assez sobre dans ses effets, mais sobre ne signifie pas que l’ensemble n’est pas efficace. Les passages-chocs ne manquent pas d’intérêt, grâce à d’excellentes idées de mise en scène et des trouvailles visuelles très fortes.
Les poursuites nocturnes, qui voient Christine chasser un à un les brutes qui martyrisent Arnie à l’école (et qui ont eu la très mauvaise idée d’essayer de la détruire), sont ainsi très intenses. Et l’utilisation de la musique est judicieuse : les extraits de vieux tubes de rock sont parfaitement adaptés à chaque situation et le thème très jazzy qui accompagne l’« auto-réparation » de Christine lors d’une scène-clé est particulièrement savoureuse.
Tourné pour un peu moins de 10 millions de dollars, Christine en a rapporté un peu plus du double rien que sur le territoire américain. Succès modeste, mais suffisant pour que Carpenter continue sa collaboration avec la Columbia en enchaînant avec la romance S.F. Starman.
Mais ceci est une autre histoire…